Blog des bibliothèques et archives diocésaines d'Aix-en-Provence et Arles, de Marseille, et de Gap et Embrun, de Toulon
jeudi 20 décembre 2018
mercredi 19 décembre 2018
mardi 18 décembre 2018
Robert Spaemann (1927-2018)
Robert Spaemann, l’un des
pères de l’écologie intégrale
Avec le retour à Dieu du philosophe catholique Robert Spaemann, l’Europe
perd un grand penseur critique de la Modernité. L’académicien Rémi Brague, qui
l’a bien connu, nous introduit dans sa pensée, très familière des auteurs
français. Au cœur de ses recherches, le concept de nature, sans laquelle la
philosophie serait impossible, tout comme une éthique de la personne orientée
vers le bien.
Le monde philosophique vient de subir, ce même lundi 10 décembre 2018, deux
très lourdes pertes : celle de Xavier Tilliette, s.j. (né en 1921), un
Français, spécialiste de pensée allemande, en particulier de Schelling, et
celle de Robert Spaemann (né en 1927), un Allemand qui a rédigé deux thèses
ouvrant une carrière universitaire sur des penseurs français. On m’a chargé de
parler ici du second, mais je voulais d’abord souligner cet intéressant
chassé-croisé.
Un philosophe détective
J’ai rencontré Robert Spaemann pour la première fois à Munich, où il était
déjà professeur à l’Université, après avoir enseigné à Stuttgart, puis à
Heidelberg. Si ma mémoire est bonne, c’était en 1975, à l’occasion d’une
réunion de lancement de l’édition francophone de la revue Communio.
Je me souviens que lors d’une pause d’amicale conversation, j’étais assis à sa
droite, et regardais le profil de son visage émacié, son front bombé, son nez
aquilin, sa bouche mince plissée sur une pipe recourbée. Immédiatement, un nom
me vint à l’esprit : Sherlock Holmes !
En un sens, je ne me trompais pas. Un philosophe est toujours plus ou moins
un détective. Et tout spécialement quand il fonde ses hypothèses sur l’examen
minutieux des faits d’histoire de la pensée, que tout le monde voit, mais que
lui seul observe… Les indices qu’il faut ici faire parler sont de minimes
inflexions dans l’usage de certaines notions, dissimulées par la présence dans
le vocabulaire de mots qui restent les mêmes.
C’est dans ce style que Spaemann avait entamé sa carrière de chercheur, à
l’école de Joachim Ritter, maître d’œuvre de ce monumental Historisches
Wörterbuch der Philosophie qui synthétise en douze épais
volumes les résultats acquis pendant des dizaines d’années par de nombreuses
équipes d’érudits.
La Modernité européenne et l’inversion
des fins
Spaemann consacra sa « dissertation » (naguère imitée dans le
système français par la « thèse de troisième cycle ») à Louis de
Bonald, et son travail d’habilitation (un peu notre défunte « thèse
d’État ») à Fénelon. Il écrivit aussi deux ouvrages sur Jean-Jacques
Rousseau, et citait volontiers Bernanos.
Il vit en Bonald plus que le réactionnaire auquel on le réduit trop
souvent, le fondateur de l’approche sociologique des faits humains. Et c’est
l’étude de Fénelon qui lui fit découvrir le fait sur lequel pivota la pensée
européenne pour entrer dans la Modernité : l’inversion de la téléologie.
En un mot, les choses ne sont plus considérées comme poursuivant les fins que
leur indique leur nature ; elles sont désormais tenues de servir les fins
que nous leur dictons. Qu’on réfléchisse un instant sur l’audace avec laquelle
Descartes utilise l’adjectif « propre » quand il écrit qu’il s’agit,
grâce à ce qu’il appelle la « philosophie pratique » (là aussi, quel
culot !) d’user des corps pour « tous les usages auxquels ils
sont propres » (Discours de la méthode, 6e partie —
souligné par moi).
Comment la nature nous oriente vers le
bien
C’est le concept de nature qui constituait sans doute le centre de la
pensée de Spaemann. Ce mot ne désigne pas notre représentation devenue
habituelle du « naturel » comme de ce qui est brut et demande à être
raffiné par la « culture », voire carrément refoulé et remplacé par
une technique invasive. Son emploi par Spaemann repose sur cette constatation
banale, mais sans laquelle aussi bien la philosophie que la science qui en est
issue, seraient impossibles : les choses sont ce qu’elles sont,
indépendamment de nous. Aristote avait fait un pas de plus, et Spaemann le
suit : tout ce qui existe possède des propriétés qui l’orientent vers son
bien. Et nous aussi, qui sommes des personnes…
Lire aussi :
La France n’a pas suffisamment rendu à Robert Spaemann l’amour qu’il
portait aux penseurs qui s’exprimaient dans sa langue. Alors que les Italiens
et les Espagnols ont tout traduit, et les Polonais presque tout, guère plus
d’une demi-douzaine de ses livres est accessible aux mondes anglophone et
francophone. Certes, son œuvre n’est pas totalement inconnue de ce dernier,
grâce aux traductions méritoires que nous devons à Stéphane Robilliard. Si
certaines sont parues chez des éditeurs ayant pignon sur rue et diffusant bien,
d’autres ont dû trouver refuge dans de petites maisons, dont il faut d’autant
plus saluer le courage, mais dont l’écho reste confidentiel.
Écologiste intégral
Il faut dire que Spaemann avait des prises de position devant lesquelles
bien des lâchetés ont cessé de nous surprendre : ce catholique fervent
(cela suffisait déjà à le rendre odieux à beaucoup) était contre l’énergie
nucléaire, et à plus forte raison contre l’arme atomique, contre la
vivisection, mais aussi contre l’avortement et l’euthanasie. Toutes positions
qu’il défendait au moyen d’arguments purement rationnels. On pense au projet
d’écologie intégrale, d’un souci écologique s’étendant à l’homme, lancé par le
pape Benoît XVI et défendu aujourd’hui par beaucoup de bons esprits.
L’œuvre de Robert Spaemann pourrait leur permettre d’approfondir encore
leur réflexion. Le plus bel hommage que nous pourrons
rendre à la mémoire du philosophe sera de le lire et relire.
À lire, de Robert Spaemann en français :
Notions fondamentales de morale, Flammarion, 2011, 7
euros.
Les Personnes. Essai sur la différence entre quelque
chose et quelqu’un, Cerf, 2010, 30 euros.
Ré https://fr.aleteia.org/2018/12/15/robert-spaemann-lun-des-peres-de-lecologie-integrale/mi
Brague | 15 décembre 2018
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Ax et Arles
L'alliance irrévocable : Benoit XVI et la judaïsme
L’alliance
irrévocable : Joseph Ratzinger – Benoît XVI et le judaïsme
Paris, Communio,
Parole et Silence, 2018. 284 pages.
Résumé
Après des siècles d'ignorance,
de mépris, voire d'antijudaïsme, de la part des chrétiens, ce qui prépara la
voie à l'effroyable antisémitisme nazi du Troisième Reich, l'article 4 de la
déclaration Nostra AEtate, votée par les Pères conciliaires en 1965 a marqué un
tournant considérable dans les relations entre les Juifs et l'Eglise
catholique, ouvrant un dialogue fait de reconnaissance et de respect mutuels.
En 2017, à la demande du
cardinal Koch, le pape émérite Benoît XVI a accepté de publier des remarques
intitulées Les dons et l'appel sans
repentir initialement destinées à la seule Commission. D'abord parues dans
l'édition allemande de Communio, puis
traduites dans l'édition francophone, ces remarques ont suscité des réactions,
notamment celle du Grand rabbin de Vienne Arie Folger qui s'exprima dans la
presse de Berlin. Ceci donna lieu pendant l'été 2018 à une correspondance entre
le pape émérite et le Grand rabbin. Pour compléter ce dossier, il nous a paru
utile de joindre un important document sur Le
peuple juif et ses saintes Ecritures
dans la Bible chrétienne publié en 2001 par la Commission biblique, la "réflexion théologique sur les
rapports entre catholiques et Juifs" signée par le cardinal Koch,
Président de la Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme
(2015) et le texte Entre Jérusalem et
Rome. Le partage de l'universel et le respect du particulier publié en février 2017 par la Conférence des rabbins
européens et approuvé par le Comité exécutif du Conseil des rabbins américains.
Ce texte a été présenté au pape François lors d'une audience le 31 août 2017.
Le dossier réuni ici par Communio ne contient pas la totalité des
documents parus sur les relations entre l'Eglise et le judaïsme. Néanmoins, de
la Déclaration conciliaire au discours du pape François, il couvre de manière
significative soixante années de dialogue intra-religieux.
Présentation de cet ouvrage par la site ZENIT, un
organe d’information du Vatican.
Un manuel incontournable pour tous les catéchistes
“L’alliance irrévocable. Joseph Ratzinger-Benoît XVI et le judaïsme”: ce
précieux volume est publié en français par Communio/Parole et
Silence (290 p.)
La grande nouveauté du volume c’est sans doute à la fois la correspondance
du pape émérite avec le rabbin Folger, et la mise ensemble de différents
documents clefs. Les traductions de l’allemand sont de Jean-Robert Armogathe.
Les catéchistes ont là un nouvel instrument de formation indispensable et sûr,
sous la houlette de Benoît XVI.
C’est un dossier réuni par Communio/Parole et silence qui ne
contient pas la totalité des documents parus sur les relations entre l’Eglise
catholique et le judaïsme depuis la Déclaration conciliaire “Nostra Aetate” (28 octobre 1965). Mais il
couvre « de manière significative » soixante années de dialogue,
explique l’éditeur.
Celui-ci indique que tout est parti, en 2017, d’une demande du cardinal
Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des
chrétiens, et président de la Commission vaticane pour les relations
religieuses avec le judaïsme. Le cardinal Koch suggéré à Benoît XVI de publier
des remarques intitulées « Les dons et l’appel sans repentir »,
initialement destinées à la Commission vaticane. Elles ont été ensuite publiées
par Communio, en allemand puis en français. La réaction du grand
rabbin de Vienne, Arie Folger, a suscité une correspondance entre le pape
émérite et le grand rabbin, l’été dernier.
Puis le dossier s’enrichit de deux documents de la Commission biblique
vaticane. D’une part, le document sur « Le peuple juif et les Saintes
Ecritures dans la bible chrétienne » (2001, le card. Ratzinger présidait
la Commission et signe la préface). D’autre part, une « Réflexion
théologique sur les rapports entre catholiques et juifs », du cardinal
Koch (2015).
S’y ajoute le document publié en février 2017 par la Conférence des rabbins
européens, approuvé par le Comité exécutif des rabbins américains, « Entre
Jérusalem et Rome. Le partage de l’universel et le respect du
particulier ».
Le discours du pape François aux représentants de la Conférence des rabbins
européens, du Conseil rabbinique d’Amérique et de la Commission du Grand
rabbinat d’Israël (31 août 2017) complète l’ensemble.
Dans « Le don et l’appel sans repentir », présenté par le p.
Olivier Artus et par le cardinal Koch, Joseph Ratzinger-Benoît XVI, rappelle
notamment que l’Alliance avec Israël, selon l’enseignement de l’Epître aux
Romains, « n’a jamais été révoquée ».
Comme le souligne le p. Artus les deux thèses principales – qui fondent le
dialogue avec le judaïsme – sont explicitées: d’une part, la
« théorie » (et non pas théologie !) « de la
substitution » doit être rejetée, et d’autre part, l’Alliance établie par
Dieu en faveur d’Israël « est irrévocable ».
L’enjeu c’est aussi le « jamais plus » d’après la Shoah:
dans sa correspondance avec le rabbin autrichien, le pape émérite déplore
notamment « la triste histoire de l’antijudaïsme chrétien qui conduit
finalement à l’antijudaïsme antichrétien des nazis » et à
« Auschwitz ».
En somme, ce qui est pour la première fois publié, ensemble et en français,
c’est un manuel incontournable pour tous les catéchistes catholiques
francophones et pour tous ceux qui sont chargés de transmettre la foi.
Incontournable, parce que sans ce socle, la catéchèse ne serait pas vraiment
catholique : ce n’est pas une option.
Leur formation et leur mission c’est d’ailleurs l’intention de prière du
pape François pour ce mois de décembre 2018.
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
samedi 15 décembre 2018
La vie et les oeuvres d'Alexandre Soljenitsyne
VIE ET ŒUVRES D’ALEXANDRE ISSAÏEVITCH
SOLJENITSYNE (1918-2008).
Alexandre Issaïevitch Soljénitsyne est un romancier et dissident russe.
Après une enfance heureuse à Rostov sur le Don, au sud de la Russie, et malgré la disparition de son père avant sa naissance, Soljenitsyne entreprend des études de sciences et de lettres. Il est ensuite mobilisé pour toute la durée de la guerre et devient capitaine.
En janvier 1945, il est arrêté pour avoir émis dans une lettre privée des doutes sur la stratégie politique de Staline, qualifié par ailleurs de "caïd". Il est condamné sans appel à 8 ans de redressement dans un camp, pour complot antisoviétique, une expérience qu'il relatera dans "Une journée d'lvan Denissovitch".
En 1962, Khrouchtchev autorise la parution de cette description crue du goulag. La publication lui attribue une reconnaissance immédiate. Cependant, à partir de 1964, il est la cible d'une vaste campagne de dénigrement orchestrée par les services de la sûreté et l'Union des écrivains. Après un dernier appel à la résistance, il est arrêté et déchu de sa nationalité.
Contraint de s'exiler en Suisse puis aux Etats-Unis, il publie ses œuvres à l'étranger : "Le Premier Cercle", "Le Pavillon des cancéreux" et "L' Archipel du goulag" (1973). Alexandre Soljenitsyne, qui a toujours plaidé pour l'abolition de la censure et subi l'ostracisme des autorités de l'URSS, obtient le prix Nobel de littérature en 1970 "pour la force éthique avec laquelle, il a perpétué les traditions de la littérature russe", qu'il ne peut recevoir que quatre ans plus tard, après avoir été expulsé d'URSS.
Huit ans après, il prononce le discours de Harvard où il fustige le monde occidental dont il déplore l'effondrement moral, l'industrialisation à outrance et le bazar mercantile. Exilé, il vit avec sa famille, dans le Vermont, pour écrire "La Roue rouge", une épopée historique comptant des milliers de pages.
Après vingt années d'exil, il rentre dans son pays en 1994. En 2007, il reçut des mains de Vladimir Poutine le prix d'Etat russe avant de se retirer du monde.
Fondée sur l'expérience du totalitarisme, son oeuvre, qui a les dimensions d'une grande fresque sociale, s'attache à révéler les falsifications de l'Histoire.
Août quatorze : Premier nœud. –
Paris, Le Seuil, 1972. 509 pages.
Dix jours avant la bataille de la Marne, l'armée russe attaque
l'Allemagne en Prusse orientale. Déjà les armées convergentes de Rennenkampf et
Samsonov forcent l'armée prussienne à battre en retraite vers la Vistule. C'est
alors que le général Hindenburg prend le commandement du front, intercepte les
ordres que Samsonov donne par radio en clair à ses unités et, coupant l'armée
russe, lui inflige une terrible défaite. Les Allemands donnèrent à leur
victoire le nom de Tannenberg, là même où, en 1410, les Polonais s'étaient
heurtés aux Chevaliers teutoniques.
Enfin, la bataille des lacs Mazures contraint à une retraite
désordonnée l'armée de Rennenkampf et écarte du front oriental la menace de
l'armée du tsar.
Août quatorze, «premier nœud» d'une œuvre que d'emblée l'on
compare à Guerre et Paix de Tolstoï, est d'abord le récit de la campagne
militaire par ses participants. Mais c'est aussi, et de façon grandiose, le
premier volet d'une fresque qui représente, en Russie et à travers les Russes,
la fin d'un monde qu'achèvera la révolution de 1917. Dans le lent et vaste
glissement de cette masse d'hommes dans la fuite ou la mort et à travers une
série de familles et de personnages dont l'impitoyable observation ne manque
jamais de tendresse, le génie de Soljénitsyne discerne avec une ironie
supérieure le mouvement profond de l'Histoire.
Ce sont donc là les premières mesures de l'œuvre qu'Alexandre
Soljénitsyne préparait depuis l'adolescence avec l'ambition de rétablir dans sa
continuité heurtée, et au-delà des ruptures de circonstance, l'histoire,
c'est-à-dire la vie même de son pays.
« Ce jour-là, on n'entendit plus
tirer de nulle part. Militaire, civil, femme ou vieillard, on ne voyait
toujours aucun Allemand. Notre armée elle-même semblait disparue, il ne restait
personne, à part leur division qu'on faisait avancer sur cette route déserte,
perdue. Il n'y avait même pas de Cosaques pour aller voir devant ce qui se
passait.Et le dernier des soldats, le plus inculte, comprenait que le
Commandement ne savait plus où il en était.
Ce jour était le quatorzième de leur marche ininterrompue, le 12 août ».
Ce jour était le quatorzième de leur marche ininterrompue, le 12 août ».
L’archipel du Goulag (1918-1956) :
essai d’investigation littéraire. Première et deuxième parties. Tome 1
Alexandre Soljénitsyne
Paris, Le Seuil, 1974. 446 pages.
Immense fresque du système
concentrationnaire en U.R.S.S. de 1918 à 1956, » L’Archipel du Goulag » (ce dernier mot est le
sigle de l’Administration générale des camps d’internement) fut terminé par
Soljénitsyne en 1968.
» Le cœur serré, je me suis abstenu,
des années durant, de publier ce livre alors qu’il était déjà prêt : le devoir
envers les vivants pesait plus lourd que le devoir envers les morts. Mais à
présent que, de toute façon, la sécurité d’Etat s’est emparée de ce livre, il
ne me reste plus rien d’autre à faire que de le publier sans délai. «
227 anciens détenus ont aidé Soljénitsyne
à édifier ce monument au déporté inconnu qu’est » L’Archipel du Goulag
« . Les deux premières parties, qui composent ce premier volume, décrivent ce que l’auteur appelle
» l’industrie pénitentiaire « , toutes les étapes par lesquelles
passe le futur déporté : l’arrestation, l’instruction, la torture, la première
cellule, les procès, les prisons, etc. – ainsi que le » mouvement
perpétuel « , les effroyables conditions de transfert. Les deux parties
suivantes sont consacrées à la description du système et de la vie
concentrationnaires «
L’archipel du Goulag » n’est pas un
roman mais, comme l’intitule Soljénitsyne, un essai d’investigation littéraire.
La cruauté parfois insoutenable des descriptions, l’extrême exigence de
l’auteur vis-à-vis de lui-même et l’implacable rigueur du réquisitoire sont
sans cesse tempérées par la compassion, l’humour, le souvenir tantôt attendri,
tantôt indigné ; les chapitres autobiographiques alternent avec de vastes
aperçus historiques ; des dizaines de destins tragiques revivent aux yeux du
lecteur, depuis les plus humbles jusqu’à ceux des hauts dignitaires du pays. La
généralisation et la personnalisation, poussée chacune à leur limite extrême, font
de » L’Archipel du Goulag » un des plus grands livres jamais écrits
vivant au monde, » notre contemporain capital « .
L’archipel du Goulag (1918-1956) :
essai d’investigation littéraire . Troisième et quatrième parties. Tome 2
Alexandre Soljenitsyne
Paris, Le Seuil, 1974. 501 pages.
« Dans sa lutte inégale contre le
pouvoir terrestre, usurpateur et mystificateur, l’homme désarmé n’a pas eu
depuis des siècles, sous aucune latitude, de défenseur plus lucide, plus
puissant et plus légitime qu’Alexandre Issaïevitch Soljjénitsine… ».
« C’est probablement le livre de ce siècle. Il va écraser sous sa,
masse, sous son poids spirituel et temporel, tout ce qui a été publié deouis la
guerre…«
Ces deux phrases résument des
milliers de réactions qui ont salué de toutes parts la publication du premier
tome de l’Archipel du Goulag.
Ce volume central plonge à présent le
lecteur au coeur même de l’histoire et de la géographie de l’Archipel. On
assiste à son surgissement, à sa consolidation, à son essaimage et à sa prolifération
à la surface de ce pays qui a fini par devenir une sorte d’immense banlieue de
ses propres camps, vivant du travail exterminateur d’une nouvelle nation
d’esclaves, tout en s’imprégnant peu à peu de ses mœurs et de ses mots. Voici
décrite par le menu cette « culture » concentrationnaire qui s’est perpétuée
pendant des décennies chez des dizaines de millions d’indigènes de l’Archipel,
avec ses rites, ses règles, sa tradition orale, sa hiérarchie et ses castes,
jusqu’à engendrer comme une nouvelle espèce infra-humaine – les zeks-, peuplade
unique dans l’Histoire, la seule sur cette planète à avoir connu une extinction
aussi rapide et à la compenser par un mode de reproduction non moins accéléré :
les flots successifs d’arrestations massives.
Impossible à un seul rescapé de tout
vouloir décrire en quelques centaines de pages, précise Soljénitsyne ; ajoutant
toutefois : « Mais la mer, pour savoir quel en est le goût, il n’est besoin que
d’une gorgée. »
L’archipel du Goulag (1918-1956) :
essai d’investigation littéraire. Cinquième et sixième parties. Tome 3.
Paris, Le Seuil, 1976. 468 pages.
Voici le troisième et dernier volume d’une
œuvre qui restera comme un monument impérissable à la mémoire des dizaines de
millions de victimes du totalitarisme en URSS. Il traite de la période finale du règne de
Staline et de celui de ses successeurs : comment, un quart de siècle après son
abolition par la Révolution, a été rétabli le bagne russe, bientôt confondu
avec les « camps spéciaux », réservés aux détenus politiques, où on
leur fait porter des numéros comme chez les nazis – oui, encore quelques années
après Nuremberg, quand l’humanité soupirait : « Cela ne se reproduira plus
jamais ! «
A ceux qui n’ont pas manqué de demander,
aux historiens marxistes soucieux de rejeter sur les victimes la responsabilité
de leur sort : « Mais pourquoi donc vous êtes-vous laissé faire ? »
Soljénitsyne répond par une extraordinaire chronique des évasions, grèves,
révoltes héroïques qui ont jalonné l’histoire des camps soviétiques de
l’après-guerre et dont personne n’avait eu jusqu’ici connaissance.
La mort de Staline a-t-elle mis fin au
Goulag ? Absolument pas, répond Soljénitsyne. A certains égards, le régime
des camps s’est encore durci. Quant à la relégation, cette forme d’exil
intérieur qui toucha 15 millions de paysans lors de la
« dékoulakisation », puis des nations entières, elle est devenue une
méthode généralisée de mise à l’écart des indésirables. En bref, « les
dirigeants passent, l’Archipel demeure ».
Au terme de leur lecture, bien peu
d’Occidentaux contesteront qu’ils viennent de refermer un témoignage unique sur
l’Histoire d’un siècle barbare, ainsi qu’une œuvre majeure de la littérature
mondiale.
Le chêne et le veau : esquisses de la vie littéraire. –
Avec en appendices un choix de documents. – Paris, Le Seuil, 1975. 569 pages.
"Un renne donne du front contre le chêne..."
dit une locution proverbiale russe, qui explique le titre du livre. Commencés
au plus fort de la répression post-kroutchévienne contre les mileux
"dissidents", après la saisie des archives de Soljénitsyne et au
lendemain du procès Siniavsky-Daniel, ces mémoires ne sont pas seulement une
chronique de vingt ans de vie littéraire officielle et clandestine en URSS
après Staline, mais se lisent comme le roman autobiographique de l'écrivain
lui-même. Ils s'achèvent sur son arrestation et son bannissement en 1974, sauvé
par la publication de l'Archipel du Goulag.
Discours américains : recueil de
trois discours prononcés en juin-juillet 1975 aux Etats-Unis – Paris, Le Seuil,
1975. 87 pages.
Les droits de l’écrivain. – Paris, Le
Seuil, 1972. 124 pages.
Les Droits de l'écrivain» réunissent un entretien de
l'auteur avec Pavel Lichko, mars 1967, un recueil de ses lettres à l'Union des
écrivains soviétiques, mai 1967-avril 1968, et un compte-rendu de sa
comparution devant elle.
Salué en Occident comme le plus grand écrivain
russe vivant, prix Nobel de littérature en 1970, consacré par la publication
simultanée dans les pays occidentaux d'Août quatorze, A. Soljénitsyne demeure
persécuté en URSS où ses oeuvres interdites circulent clandestinement.
Voici recueillies ses lettres de protestation à l'Union des écrivains soviétiques et le compte rendu qu'il a rédigé de sa comparution devant elle : une des plus sinistres tragi-comédies qu'on puisse lire. En annexe à ce recueil figure le texte du discours que Soljénitsyne a écrit, mais n'a pu prononcer, à l'occasion du prix Nobel.
Voici recueillies ses lettres de protestation à l'Union des écrivains soviétiques et le compte rendu qu'il a rédigé de sa comparution devant elle : une des plus sinistres tragi-comédies qu'on puisse lire. En annexe à ce recueil figure le texte du discours que Soljénitsyne a écrit, mais n'a pu prononcer, à l'occasion du prix Nobel.
L’erreur de l’Occident. – Paris, Grasset, 1980. 126 pages.
Textes précédemment parus en anglais dans
"Time", février 1980 et
Dans cet essai oublié pour la première
fois en 1980, l'auteur de l'Archipel du Goulag rappelle que le communisme est
un mal universel et s'interroge sur ce qui conduit les milieux influents, en
Occident, à laisser croire que communisme et Russie ne font qu'un, que
l'idéologie et le système communistes sont une spécificité russe, comme les
zakouskis ou les ballets du Bolchoï.
Qui sont les propagateurs de cette vision du monde où la Russie ferait figure de seul et unique foyer d'infection répandant la pandémie communiste de par le monde ?"
Qui sont les propagateurs de cette vision du monde où la Russie ferait figure de seul et unique foyer d'infection répandant la pandémie communiste de par le monde ?"
Une journée d’Ivan Denisovitch. – Paris, Union générale
d’éditions, 1963. 192 pages.
En 1962, pour qu'Une journée d'Ivan
Denissovitch pût être publiée en URSS, Soljenitsyne avait dû consentir à des
coupures et, par endroits, remanier le texte original. Voici la version
intégrale de ce roman si profondément, si tragiquement russe et qui, cependant,
fait maintenant partie du patrimoine mondial de la culture. Vingt ans ont passé
depuis qu'il a vu le jour. Des œuvres monumentales ont succédé à ce joyau : le
Premier Cercle, le Pavillon des cancéreux, Août Quatorze et ce requiem colossal
qu'est l'Archipel du Goulag ; pourtant, c'est toujours Ivan Denissovitch qui
revient le premier à la mémoire dès qu'on nomme Soljenitsyne.
Récit, dans sa version intégrale, de la douloureuse expérience du maçon Denissovitch dans le camp Solovetski. Cette description crue du goulag a fait sensation dès sa parution.
Quatrième de couverture:
Une journée d'Ivan Denissovitch , c'est celle du bagnard Ivan Denissovitch Choukhov, condamné à dix ans de camp de travail pour avoir été fait prisonnier au cours de la Seconde Guerre mondiale. Le récit nous montre sa journée depuis le coup sur le rail suspendu dans la cour qui marque le lever, jusqu'au court répit du soir et au coucher, en passant par les longues procédures de comptage, la peur des fouilles, les bousculades au réfectoire, les travaux de maçonnerie par un froid terrible dans l'hiver kazakhe, les menues chances et malchances de la journée. Archétype du paysan russe moyen, Choukhov, homme humble et débrouillard en qui le bien fait encore son œuvre , a su se libérer intérieurement et même vaincre la dépersonnalisation que ses maîtres auraient voulu lui imposer en lui donnant son matricule. Le talent propre à Soljénitsyne, son don de vision interne des hommes apparaissent ici d'emblée dans une complète réussite : ce chef-d'œuvre à la structure classique restera dans toutes les anthologies du vingtième siècle comme le symbole littéraire de l'après-Staline.
Récit, dans sa version intégrale, de la douloureuse expérience du maçon Denissovitch dans le camp Solovetski. Cette description crue du goulag a fait sensation dès sa parution.
Quatrième de couverture:
Une journée d'Ivan Denissovitch , c'est celle du bagnard Ivan Denissovitch Choukhov, condamné à dix ans de camp de travail pour avoir été fait prisonnier au cours de la Seconde Guerre mondiale. Le récit nous montre sa journée depuis le coup sur le rail suspendu dans la cour qui marque le lever, jusqu'au court répit du soir et au coucher, en passant par les longues procédures de comptage, la peur des fouilles, les bousculades au réfectoire, les travaux de maçonnerie par un froid terrible dans l'hiver kazakhe, les menues chances et malchances de la journée. Archétype du paysan russe moyen, Choukhov, homme humble et débrouillard en qui le bien fait encore son œuvre , a su se libérer intérieurement et même vaincre la dépersonnalisation que ses maîtres auraient voulu lui imposer en lui donnant son matricule. Le talent propre à Soljénitsyne, son don de vision interne des hommes apparaissent ici d'emblée dans une complète réussite : ce chef-d'œuvre à la structure classique restera dans toutes les anthologies du vingtième siècle comme le symbole littéraire de l'après-Staline.
Lettre aux dirigeants de l’Union Soviétique : [5 septembre
1973] et autres textes [1972-1974]. –Paris, Le Seuil, 139 pages.
"Quand la violence fait
irruption dans la vie paisible des hommes, son visage flamboie d'arrogance,
elle porte effrontément inscrit sur son drapeau, elle crie : "Je suis
la violence ! Place, écartez-vous, ou je vous écrase !" Mais la
violence vieillit vite, encore quelques années et elle perd son assurance, et
pour se maintenir, pour faire bonne figure,
elle recherche obligatoirement l'alliance du mensonge. Car la violence ne peut
s'abriter derrière rien d'autre que le mensonge, et le mensonge ne peut se
maintenir que par la violence. Et ce n'est ni chaque jour, ni sur chaque épaule
que la violence pose sa lourde patte : elle n'exige de nous que notre
obéissance au mensonge, que notre participation quotidienne au mensonge et
c'est tout ce qu'elle attend de ses loyaux sujets.
Et c'est là justement que se trouve, négligée par nous, mais si simple, si accessible, la clef de notre libération : le refus de participer personnellement au mensonge ! Qu'importe si le mensonge recouvre tout, s'il devient maître de tout, mais soyons intraitables au moins sur ce point : qu'il ne le devienne pas par moi !"
Alexandre Soljénitsyne, Moscou, 12 février 1974.
Et c'est là justement que se trouve, négligée par nous, mais si simple, si accessible, la clef de notre libération : le refus de participer personnellement au mensonge ! Qu'importe si le mensonge recouvre tout, s'il devient maître de tout, mais soyons intraitables au moins sur ce point : qu'il ne le devienne pas par moi !"
Alexandre Soljénitsyne, Moscou, 12 février 1974.
Le Pavillon des cancéreux. – Paris, Le Livre de poche, 1973. 701
pages.
En 1955, au début de la déstalinisation,
Alexandre Soljenitsyne est exilé dans un village du Kazakhstan après huit ans
de goulag. Il apprend alors qu'il est atteint d'un mal inexorable dont le seul
nom est un objet de terreur. Miraculeusement épargné, il entreprendra quelques
années plus tard le récit de cette expérience.
Au " pavillon des cancéreux ", quelques hommes, alités, souffrent d'un mal que l'on dit incurable. Bien que voisins de lit, Roussanov et Kostoglotov ne se parlent pas. Pour l'un, haut fonctionnaire, la réussite sociale vaut bien quelques concessions. Pour l'autre, Kostoglotov, seule compte la dignité humaine. Pour ces êtres en sursis, mais également pour Zoé la naïve, Assia la sensuelle, Vadim le passionné, c'est le sens même de leur vie qui devient le véritable enjeu de leur lutte contre la mort. Une œuvre de vérité.
Au " pavillon des cancéreux ", quelques hommes, alités, souffrent d'un mal que l'on dit incurable. Bien que voisins de lit, Roussanov et Kostoglotov ne se parlent pas. Pour l'un, haut fonctionnaire, la réussite sociale vaut bien quelques concessions. Pour l'autre, Kostoglotov, seule compte la dignité humaine. Pour ces êtres en sursis, mais également pour Zoé la naïve, Assia la sensuelle, Vadim le passionné, c'est le sens même de leur vie qui devient le véritable enjeu de leur lutte contre la mort. Une œuvre de vérité.
Le Premier cercle. – Paris, Laffont, 1972. 823 pages.
Le jeune diplomate Volodine a eu
connaissance d'un piège tendu à un médecin de valeur, ami de sa famille,
Doit-il le prévenir ? Sa conscience et son coeur disent oui, l'instinct de
conservation regimbe. En 1949, sous Staline, il faut se montrer en tout d'une
extrême prudence si l'on veut vivre ou simplement survivre, mais alors est-on
encore un être humain ? D'ailleurs, il n'existe pas de technique permettant
d'identifier les voix. En appelant d'une cabine publique, en faisant vite, les
risques restent limités. Et Volodine téléphone. Par malheur, il y a près de
Moscou, à Mavrino, une de ces prisons surnommées charachkas où les détenus
politiques, pour la plupart ingénieurs et techniciens, sont employés à des
travaux de recherche. Ceux de Mavrino s'occupent de mettre au point un
téléphone assurant le secret absolu des communications et, accessoirement,
d'élaborer un système de codification de la voix analogue à celui des
empreintes digitales. Qui sont ces détenus ? Des mathématiciens, des paysans ou
de hauts fonctionnaires qui ont plongé par le hasard d'un caprice ou, d'une
dénonciation dans l'Enfer de la disgrâce dont la charachka est le premier
cercle, le camp de déportation le dernier ? épreuves qu'Alexandre Soliénitsyne,
pour les avoir vécues, décrit et dénonce avec vigueur dans ce livre
bouleversant.
MARTIN, André. Soljénitsyne le croyant : lettres, discours,
témoignages. – Paris, Editions Albatros, 1973. 171 pages.
La
prière d’Alexandre Soljénitsyne
"La
lutte pour la liberté que nous ignorons en Occident, des hommes et des femmes
en Union soviétique la mène âprement et parfois au risque de subir ce qui est
pire que la mort : la désintégration de leur personne dans des asiles conçus
pour réduire à néant tous ceux qui veulent vivre, agir et penser en hommes
libres. (...) Il fallait un géant comme Soljenitsyne pour nous en faire prendre
conscience." André Martin
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
Jésus, l'homme qu préférait les femmes
Jésus, l’homme
qui préférait les femmes
Christine Pedotti
Paris, Albin
Michel, 2018. 184 pages.
Rares ont été jusqu’ici les recensions
pour présenter le livre de Christine Pedotti « Jésus, l’homme qui préférait
les femmes ». Voici deux articles qui le présentent : dans le
premier, c’est l’auteur elle-même qui en parle ; le second donne le point
de vue protestant sur ce livre.
Il est étrange que la présence des femmes
dans les Evangiles ait été si peu remarquée depuis deux mille ans. Car ce ne
sont pas les textes qui sont misogynes mais la lecture qui en est faite
Il y a sept choses que Dieu déteste, et
la première est un homme qui n’a pas de femme. »
Ce proverbe juif, bien connu au temps de
Jésus, continue à nourrir toute sorte de fantasmes sur une femme que Jésus
aurait pu avoir (Marie-Madeleine) ou une famille qu’il aurait pu fonder. Il
reste que le célibat de Jésus questionne l’historien honnête ; est-il possible
qu’un juif pieux – et il ne fait pas de doute que Jésus en était un puisse, à
30 ans, n’être pas marié ? C’est si intrigant que des scientifiques réputés
pensent qu’il est possible que Jésus ait été marié et soit veuf au moment où il
entame ce qu’on nomme sa « vie publique ». En effet, à l’époque, les
jeunes gens se mariaient entre 16 et 18 ans, les jeunes filles à partir de 12
ou 13 ans.
Pourtant, sauf à aller chercher des textes
datant de plusieurs siècles après la mort de Jésus, il n’y a pas la moindre
trace, pas la moindre évocation d’une famille de Jésus autre que ses parents et
ses frères et sœurs, dans les Evangiles ou les lettres de Paul.
Les disciples, en revanche, sont au détour
d’une phrase munis d’une femme et d’une famille : ainsi, Paul, qui lui-même est
célibataire, défend le droit qu’il aurait de prendre femme en écrivant aux
chrétiens de Corinthe : « N’avons-nous pas le droit d’emmener une épouse
croyante, comme les autres apôtres, et les frères du Seigneur, et Céphas
? » (1 Corinthiens, 9 :5 – Céphas est l’autre nom de l’apôtre Pierre).
Jésus, protecteur des femmes
Pourtant, s’il n’y a pas la moindre trace
d’une femme de Jésus, il y a autour de Jésus beaucoup de femmes, et le moins
que l’on puisse dire, c’est qu’il se conduit avec elles d’une façon extrêmement
singulière pour les usages de son temps. En effet, la société juive de l’époque
est très fortement patriarcale. Les femmes passent de l’autorité de leur père à
celle de leur mari, ou, à défaut, de leur frère ou de leur fils aîné. Qu’une
femme puisse être indépendante est inenvisageable, et le malheur et la misère
tombent sur les veuves sans protecteur ou les épouses répudiées.
L’Evangile évoque l’extrême pauvreté des
veuves. Quant aux répudiées, elles sont réduites,
dans le meilleur des cas, à une situation de domesticité dans la maison de leur
père ou de leur frère et, le plus souvent, à la prostitution. L’opposition de
Jésus à la répudiation – et non au divorce comme on le dit trop souvent – est
évidemment une interdiction faite aux hommes de se débarrasser d’une épouse
comme d’un vieux chameau de réforme. Les disciples ne s’y trompent d’ailleurs
pas qui s’exclament : « Si telle est la condition de l’homme envers la
femme, il n’est pas avantageux de se marier » (Matthieu, 19 :10). En cette
matière, Jésus est bien le protecteur des femmes contre la « dureté du
cœur des hommes ».
Le rôle « naturel » de la femme
Mais Jésus ne protège pas seulement les
femmes, il les considère comme de véritables interlocutrices. L’Evangile de Luc
le montre ainsi dans la maison de deux femmes, Marthe et Marie, sœurs de
Lazare, à Béthanie. Marthe, sans doute l’aînée, s’agite à la cuisine comme une
bonne maîtresse de maison afin d’accueillir dignement son hôte, tandis que
Marie demeure assise aux pieds de Jésus, qu’elle écoute. Mais Marthe ne
l’entend pas ainsi, et l’évangéliste, avec un beau talent littéraire, nous la
montre furibarde, faisant, en une seule phrase, reproche à Jésus et à sa sœur :
« Cela ne te fait rien que ma sœur me
laisse servir toute seule ? Dis-lui donc de m’aider ! »
Et bien non, n’en déplaise à Marthe, cela
ne lui fait rien, à Jésus, qui répond à la râleuse :
« Marie a choisi la meilleure part,
elle ne lui sera pas enlevée » (10 : 40-42).
Le rôle « naturel » de la femme
n’est donc pas d’être à la cuisine ! Si une femme le souhaite, elle a droit à
la part qui, dans le judaïsme traditionnel, est celle des hommes : celle de la
réflexion et de l’étude.
Si la place des femmes n’est pas à la
cuisine, serait-elle dans la maternité ? Pas sûr. Un peu
plus tard, l’Evangile rapporte une autre scène : alors que Jésus traverse un
village, une femme crie dans la foule : « Heureuses les entrailles qui
t’ont porté et les seins que tu as sucés ! » La réponse de Jésus fuse
: « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et l’observent
! » (11 :27-28). Ainsi donc, le bonheur d’une femme ne serait pas
dans son ventre et ses seins ?
Jésus n’est pas toujours entouré de femmes
convenables…
Mais la singularité de la relation de
Jésus avec les femmes ne se résume pas à ces épisodes, car des femmes, dans les
Evangiles, il n’en manque pas et, contrairement à ce qu’on imagine, la mère de
Jésus, Marie de Nazareth, bien qu’omniprésente dans le catholicisme et dans
l’orthodoxie, n’y est guère qu’une présence furtive. Ni Jean ni Paul ne
connaissent son nom.
Ce sont donc d’autres femmes qui entourent
Jésus, et, il faut bien le reconnaître, pas toujours des femmes convenables.
C’est le cas d’une célèbre prostituée,
lors d’un banquet chez un certain Simon – on la confond souvent à tort avec
Marie-Madeleine, que Jésus délivre de sept démons. La belle de chez Simon
saisit les pieds de Jésus, les baigne de ses larmes, les essuie avec ses
cheveux et y répand un très coûteux parfum sous le regard réprobateur du maître
de maison et de ses invités qui se scandalisent que Jésus accepte sans
protester un hommage si sensuel. Ne voit-il pas qui est cette femme ? Si, il le
voit très bien, et c’est pour elle qu’il déclare :
« A ceux qui auront beaucoup aimé, il
sera beaucoup pardonné » (Luc, 7 :47).
A cette rencontre fait écho la scène de la
femme prise en flagrant délit d’adultère qui est jetée par ses accusateurs aux
pieds de Jésus : doit-on la lapider comme le prescrit la loi de Moïse ? Non
sans humour, Jésus propose que celui qui n’a jamais péché jette la première
pierre. Tous les hommes, confus, se retirent et Jésus relève la femme :
« Moi non plus, je ne te condamne
pas » (Jean, 8 :11).
S’il y a de la misogynie dans les
Evangiles, c’est celle des disciples
Jésus est aussi montré par les auteurs des
Evangiles comme celui qui se laisse toucher, au propre et au figuré, par la
détresse des femmes. Jésus ne montre aucun intérêt pour les règles de pureté
rituelles qui interdisent le contact avec les femmes. Un jour, une femme
« impure » selon la loi religieuse car affligée depuis des années de
pertes de sang, touche le bas de son manteau, et Jésus, loin de s’insurger, en
la guérissant, la délivre de l’isolement social dans lequel sa maladie l’avait
plongée.
Parmi les femmes qui émeuvent Jésus, on
notera l’étrangère syro-phénicienne qui le supplie de guérir son enfant malade.
D’abord, il la repousse, mais elle insiste tant qu’à la fin il se laisse
convaincre et s’exclame : « O femme, grande est ta foi ! Qu’il t’advienne
selon ton désir ! » (Matthieu, 15 :28).
Et en effet, les Evangiles sont parcourus
par les manifestations de la foi humble et insistante des femmes. Il est
étrange que cette présence des femmes ait été si peu remarquée depuis deux
mille ans. Car ce ne sont pas les Evangiles qui sont misogynes mais la lecture
qui en est faite, qui repousse les femmes au fond du décor et privilégie les
hommes qui pourtant ne comprennent rien. Jésus ne cesse de morigéner ses propres
disciples : «Cœurs sans
intelligence… », «esprits bouchés ». Il n’y va pas de main morte !
S’il y a de la misogynie dans les
Evangiles, c’est celle des disciples, et, avec une incroyable honnêteté, ils
l’avouent. Ainsi, les femmes, et tout particulièrement Marie-Madeleine, sont
les premiers témoins de la résurrection. Ce sont elles qui, devant le tombeau
vide, reçoivent l’annonce incroyable : « Ne cherchez pas parmi les
morts celui qui est vivant. » Or, quand elles courent le rapporter aux
disciples, ceux-ci haussent les épaules : « Ces propos leur semblèrent du
radotage, et ils ne les crurent pas » (Luc, 24 :5-11).
Jésus serait-il féministe ?
Pour autant, doit-on conclure que Jésus
était féministe ? Le mot et l’idée sont bien sûr totalement anachroniques.
Cependant, on demeure étonné de la bienveillance de Jésus à l’égard des femmes.
Il ne fait pas de doute qu’il goûte leur compagnie et leur conversation. On est
étonné de constater que dans un mode de discours qui lui est très particulier,
la parabole, les images liées au monde des femmes sont nombreuses et quasi à
parité avec celles qui sont masculines. Ainsi, le Royaume de Dieu est
« comme un homme qui a perdu une brebis… », « comme une femme
qui a perdu une pièce d’argent… », «comme
une femme qui met du levain dans la pâte… », « comme un homme qui
trouve une perle de grande valeur… ». Et la confiance en Dieu est comme
celle des oiseaux qui ne sèment (masculin) ni ne tissent (féminin) mais qui
sont nourris et vêtus. Au final, ce qui est frappant, c’est à quel point Jésus
parle aux femmes « d’égal à égal ».
Le dialogue qu’il noue avec la Samaritaine
est à cet égard exemplaire. Jésus, en plein midi, au puits de Jacob, lieu de la
rencontre amoureuse par excellence, engage un dialogue théologique avec une
femme sur le « don de Dieu », et la façon de prier. « Ici ou au
Temple de Jérusalem ? » demande la femme. »En esprit et en
vérité », répond Jésus. L’évangéliste Jean nous montre d’ailleurs les
disciples choqués de voir leur maître en conversation avec cette femme. Il est
vrai que pour aller au puits en plein midi, il faut sans doute qu’elle soit en
marge de la communauté. En effet, elle l’est : femme de beaucoup d’hommes, cinq
maris successifs et un amant, paraît-il. L’évangéliste ne fait pas de mystère :
au puits de la rencontre, elle a rencontré l’homme de sa vie (le septième,
celui de l’accomplissement suivant la symbolique des nombres). Cette scène a
inspiré de nombreux peintres qui y ont figuré à la fois le désir et la soif
spirituelle. Jésus promet à la femme ce qu’il nomme « l’eau vive ».
Mais la misogynie ordinaire des commentaires des hommes d’Eglise en fait une
fille perdue, aux mœurs légères, que Jésus remet dans le droit chemin.
Hélas, la présence des femmes dans les
Evangiles a souvent donné lieu de la part des hommes, seuls autorisés à
commenter les textes, à des jugements de sotte morale sur la vertu des femmes.
Il y a pourtant bien un évangile – au sens étymologique de « bonne
nouvelle » – annoncé aux femmes et reçu par elles. Espérons que les filles
du XXIe siècle liront ces textes qui sont désormais ouverts à tous et toutes et
y trouveront matière à combattre le masculinisme arrogant, contraire au message
de Jésus, de tant d’hommes d’Eglise…
Christine Pedotti
Cet article est paru dans le hors-série de
« l’Obs », « L’énigme Jésus », en kiosque depuis le 24
décembre 2017.
Jésus, l’homme qui préférait les femmes,
un essai audacieux
Publié le : 2018-10-30 16:48:03
Joëlle Razanajohary, la fondatrice du
blog Servir ensemble, a lu pour nos lecteurs le livre :
« Jésus, l’homme qui préférait les
femmes » est un livre à la fois audacieux et simple !
Audacieux par son titre qui résume la
thèse centrale de l’auteure : Jésus, que l’histoire et la tradition
dépeignent constamment entouré d’hommes et en interaction principale avec des hommes, ‘préférait’ être en relation
avec des femmes ! La thèse est osée, puisque tout en s’opposant aux
lectures habituelles (qui placent Jésus et les douze disciples au centre des
évangiles) elle aborde avec humour les problématiques de genre sans même en
avoir l’air. Rien de ‘sexuel’ cependant dans l’affirmation… Histoire de
rassurer tout le monde !
Simple par le moyen choisi par
l’auteure pour démontrer sa thèse : l’attention concentrée sur la qualité
des relations que Jésus entretenait avec elle permet de dégager des points de
vue largement passés sous silence lorsque les lectures sont effectuées par des
hommes seulement.
Christine Pedotti fait ainsi le pari
que malgré la masculinité de tous les auteurs des évangiles, les textes
contiennent suffisamment d’indices clairs de ce que Jésus vivait avec les
femmes pour démonter les compréhensions partielles et misogynes
traditionnelles. Elle montre que nos yeux n’ont pas su, ou pas pu voir parce
qu’ils n’ont pas été formés à lire tout simplement ce qui est écrit.
Et ça marche ! Au fil des chapitres,
l’auteure déroule son fil d’Ariane à travers les textes pour nous faire entrer
dans un monde nouveau où :
La maternité n’est plus le lieu unique de vie, d’accomplissement
des femmes. La figure de Marie sa mère, le peu de places que les évangiles lui
réservent, mais aussi les différentes paroles du Christ à son égard sont
étudiées et servent à redéfinir la destinée des femmes.
De même le mariage va être l’objet d’un repositionnement
particulier grâce au focus positif placé sur le célibat. Mais c’est un célibat
volontaire dont parle Jésus. Un célibat qui ne cherche pas à fuir le sexe
opposé : Jésus lui-même célibataire, est proche des femmes et il démontre
qu’il connait bien l’univers féminin, son quotidien, puisqu’il en fait même le
lieu d’une partie de son enseignement !
Dans l’environnement immédiat du Christ apparaissent ainsi des femmes diverses dont les noms ont rarement été retenus, patriarcat oblige, mais qui toutes sont l’objet d’interactions diverses et surtout d’enseignements.
Dans l’environnement immédiat du Christ apparaissent ainsi des femmes diverses dont les noms ont rarement été retenus, patriarcat oblige, mais qui toutes sont l’objet d’interactions diverses et surtout d’enseignements.
Jésus les voit : Pour lui, les femmes ne sont pas invisibles.
Bien plus il les regarde. L’auteure montre la qualité du regard et de
l’attention que Jésus porte aux femmes : La petite veuve de Jérusalem, la
veuve de Nain, la femme courbée défilent sous nos yeux et nous réalisons
soudainement combien, oui, l’attitude de Jésus prouve son intérêt pour elles,
l’estime qu’il leur porte.
Jésus les admire : L’épisode de la femme syro-phénicienne qui
arrache à Jésus la guérison de sa fille possédée est longuement commenté, de
même que son comportement avec Marthe qu’il traite « d’homme à
homme ». Expression légèrement choquante au point de départ, mais ô combien
heureuse ! Oui, Jésus traite les femmes d’homme à homme !
Jésus parle avec les femmes et bien
plus encore, puisqu’il entame avec elles des conversations théologiques ! Ainsi, avec la samaritaine à qui il confie
pleinement qui il est et le cœur de la volonté de Dieu : Une révélation
aussi précieuse que « Dieu est esprit et il faut que ceux qui l’adorent,
l’adorent en esprit et en vérité » est confiée à une femme dans une
discussion théologique décisive. Improbable Jésus !
Jésus libère les femmes de l’enfermement
dans le service domestique et les accepte comme disciples. L’auteure affirme que dans l’épisode de Marthe
et Marie, Jésus « libère les femmes de leur assignation à une identité de
genre ». Jésus libère également les femmes de l’opprobre et du déshonneur
lié aux ‘fautes sexuelles’ ; l’épisode de la femme adultère est lu et
compris comme l’annulation d’une injustice envers les femmes trop souvent jugées seules coupables, comme la
libération de l’emprise et de la domination des hommes sur elles.
Jésus touche les femmes et se laissent
toucher par elles, ce qui est proprement scandaleux
pour un juif pieux, puisqu’on ne sait jamais à quel moment une femme est impure
à cause de ses menstruations, il vaut donc mieux ne jamais les toucher !
De « femmes sujettes à des épisodes d’impureté », elles étaient
devenues des « êtres potentiellement impurs risquant d’inoculer l’impureté
à des êtres purs ». L’épisode de la femme aux douze années de perte de
sang témoigne de la réhabilitation physique, mais aussi psychique et sociétale,
tout autant que religieuse. De même l’épisode de l’onction de Béthanie prend
ici un sens tout à fait nouveau puisqu’il est comparé à un geste prophétique et
décrit par Jésus comme un geste mémoriel malheureusement ‘oublié’ par l’histoire chrétienne
que les hommes ont écrite !
Jésus confie la bonne nouvelle de la
résurrection aux femmes. Femmes
au pied de la croix alors que les hommes
fuient. Femmes au tombeau alors que les hommes se cachent… L’auteure se pose la
question du pourquoi. Pourquoi les femmes sont-elles encore là, assurant la
continuité de l’histoire du Christ avec l’humanité alors que les hommes n’y
sont plus ? C’est ici qu’elle lit la cause de cette préférence qui relie
Jésus aux femmes. Jésus préfère les femmes non pas à cause de leur genre, mais
peut-être à cause de la profondeur de leur amour…
Le dernier chapitre va plus loin et met en
lumière la cause de cet amour profond des femmes à l’égard de Jésus. Les femmes
font partie de la catégorie des ‘petits’. Les petits, ces personnes violentées,
humiliées, rejetées, que Dieu voit et qu’il choisit toujours de relever, lui
qui est venu pour ‘disperser les superbes’…
Christine Pedotti
Biographie
Christine Pedotti est née en 1960 dans les
Ardennes. Après des études d’histoire et de sciences politiques, elle a
collaboré à la naissance de Grain de Soleil, mensuel chrétien
destiné aux enfants publié par Bayard. Elle a écrit de nombreux ouvrages
de vulgarisation de la foi catholique, principalement adressés aux jeunes et
aux enfants, en particulier dans la collection Théo chez Fleurus-Mame. . Chez
cet éditeur, elle a dirigé le département religieux et créé un département de
la jeunesse, où elle est à l’origine du Dico des Filles.
En 2008, à la suite d’un
propos sexiste du cardinal archevêque de Paris André Vingt-Trois,
elle crée, avec Anne Soupa, le Comité de la Jupe pour lutter contre la discrimination
à l’égard des femmes dans l’Eglise catholique. En 2009, toujours avec Anne
Soupa, elle crée la Conférence catholique des baptisé-e-s francophones
(C.C.B.F.), afin de promouvoir la responsabilité des baptisés catholiques.
Elle est chevalier de la Légion d’honneur
depuis le 1er janvier 2014
Ouvrages
Le petit Théo, carnet de route des années
caté, Droguet & Ardant, 2001
En collaboration avec Michel Dubost,
Stanislas Lalanne et Jacques Perrier
Le livre de la foi des tout petits, Mame, 2003
Le livre de la foi des petits enfants, Mame, 2004
Théo des tout petits en images, Droguet & Ardant, 2005
Le livre de la prière en famille, Mame/Edifa, 2006
Mon premier Théo, Mame, 2006
Nouvelle édition
Petite encyclopédie du christianisme pour
tous, Fleurus, 2007
Quand la Bible offre l’impossible, Mame, 2008
Théo Junior, Mame, 2008
Nouvelle édition
La Longue Patience du sanglier, Plon, 2009
Roman. En collaboration avec Vincent
Villeminot
Le Nouveau Théo, Mame, 2009
Direction d’ouvrage
Théo Benjamin, Mame, 2009
Nouvelle édition
Les Pieds dans le Bénitier, Presses de la Renaissance, 2010
En collaboration avec Anne Soupa
La bataille du Vatican, Plon, 2012
Ce Dieu que j’aime, Médiapaul, 2012
Faut-il faire Vatican III, Tallandier, 2012
Jésus, cet homme inconnu, XO, 2013.
La Bible racontée comme un roman , XO Editions, T1, 2015.
La Bible racontée comme un roman , XO Editions, T2, 2016
Jésus, l’Encyclopédie (dir.), Albin Michel, 2017
Jésus, l’homme qui préférait les femmes, Albin Michel, 2018
La phrase de Mgr André Vingt-Trois
qui a tout déclenché
Emission «Face aux Chrétiens», le 6 novembre dernier.
Mgr Vingt-Trois est ce jour-là l’invité de Radio-Notre-Dame. L’un des quatre
journalistes présents l’interroge sur le rôle des femmes dans la célébration
des offices. Réponse de l’archevêque de Paris : «Ce qui est plus difficile c’est d’avoir des femmes qui
soient formées, le tout ce n’est pas d’avoir une jupe, c’est d’avoir quelque chose
dans la tête». Un propos qui ne suscite alors aucune
réaction de ses interlocuteurs.
Mais la petite phrase, relevée par Le
Canard enchaîné, va déclencher ensuite des réactions outrées sur le
site de la radio associative. . De nombreux mails de paroissiens
indignés sont envoyés à Radio Notre-Dame. Les «Réseaux du parvis», une
association du diocèse de Lyon, décide de son côté d’adresser une lettre
ouverte au cardinal Vingt-Trois : «Même sous couvert d’humour, tout mépris à
l’encontre des femmes met en péril l’équilibre de la société tout entière».
Celui qui est aussi le président de la
Conférence des évêques de France leur répond alors directement dans un courrier
dont une copie a été transmise à l’Agence France-Presse. L’homme d’Eglise dit
regretter «la maladresse de (son) expression» et assure que «dans l’exercice de
(sa) responsabilité», il «n’hésite jamais à appeler des femmes à des responsabilités quand elles sont en situation
de les exercer».
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
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