Publication de l'Exhortation apostolique post-synodale
"Christus vivit"
Christus vivit: le Pape offre aux jeunes une «balise sur un chemin synodal»
Six mois après le Synode sur “Les
jeunes, la foi et le discernement vocationnel”, un de ses fruits majeurs est
rendu public ce 2 avril: l’Exhortation apostolique post-synodale Christus vivit
(«Il vit, le Christ»). Un document que le Pape François avait signé le 25 mars
dernier, aux pieds de la Vierge Marie, dans le sanctuaire de la Sainte Maison
de Lorette. Dans ce texte divisé en neuf chapitres reprenant les principaux
sujets abordés lors du Synode, le Saint-Père s’adresse directement aux jeunes,
mais aussi «à tout le peuple de Dieu, à ses pasteurs et à ses fidèles, car la
réflexion sur les jeunes et pour les jeunes nous interpelle et nous stimule
tous».
Cité du Vatican
«Il vit, le Christ, notre espérance et
il est la plus belle jeunesse de ce monde. Tout ce qu’il touche devient jeune,
devient nouveau, se remplit de vie. Les premières paroles que je voudrais
adresser à chacun des jeunes chrétiens sont donc: Il vit et il te veut vivant
!». Ainsi commence le tout premier des 299
paragraphes de cette Exhortation apostolique post-synodale rédigée
et signée par le Saint-Père. Le style du document magistériel est déjà
perceptible dans ces quelques phrases: direct, vivifiant, plein d’espérance et
jalonné par la personne du Christ.
Une exhortation apostolique écrite avec
et pour les jeunes
Le Pape lui-même explique sa démarche
concernant la rédaction d’un document qu’il qualifie de «balise sur un
chemin synodal». Une lettre écrite «avec affection» et
en tenant compte des rencontres passées. «Je me suis laissé inspirer
par la richesse des réflexions et des échanges du Synode de l’année
passée [du 3 au 28 octobre 2018]. [...] Ainsi, ma parole sera
chargée de mille voix de croyants du monde entier qui ont fait parvenir leurs
opinions au Synode. Même les jeunes non croyants, qui ont voulu y prendre part
par leurs réflexions, ont soulevé des questions qui ont suscité en moi de
nouvelles interrogations», reconnaît le Souverain Pontife.
Pour le fond, le Pape a voulu un
texte «qui rappelle certaines convictions de foi et qui, en même temps,
encourage à grandir en sainteté et dans l’engagement de sa propre vocation».
Et concernant la forme, soit François s’adresse «directement aux
jeunes» - le tutoiement est de mise dans la plupart des paragraphes -,
soit il propose «des approches plus générales pour le discernement
ecclésial», particulièrement utiles pour les pasteurs et les acteurs
de la pastorale des jeunes et des vocations.
Dans le Verbe de Dieu, des trésors de
jeunesse
Après un premier chapitre consacré aux
figures marquantes de jeunes dans la Bible, le Pape attire l’attention de ses
lecteurs sur «Jésus-Christ, toujours jeune», dont les aspects de la
vie constitue une inépuisable source d’inspiration. «Cela implique
qu’il faut mûrir dans la relation avec le Père, conscient d’être membre de la
famille et du peuple, se disposer à être comblé de l’Esprit et à être conduit
[...]. Rien de cela ne devrait être ignoré dans la pastorale des jeunes, pour
qu’on ne crée pas des projets qui isolent les jeunes de la famille et du monde,
ou qui les transforment en une minorité sélectionnée et préservée de toute
contagion. Nous avons plutôt besoin de projets qui les fortifient, les
accompagnent et les lancent vers la rencontre avec les autres, vers le service
généreux, vers la mission», conseille également le Saint-Père. «Il
est très important de contempler le Jésus jeune que nous montrent les
Évangiles, car il a été vraiment l’un de vous, et en lui on peut reconnaître
beaucoup de caractéristiques des cœurs jeunes», poursuit-il.
«Une Église qui se laisse renouveler»
Dans ce deuxième chapitre, François
évoque aussi l’Église dont les jeunes sont des membres décisifs. Une «institution
si ancienne que l’Église peut se renouveler et se rajeunir aux diverses étapes
de sa très longue histoire. En réalité, dans les moments les plus tragiques,
elle sent l’appel à retourner à l’essentiel du premier amour», peut-on
d’abord lire. Avec force, le Saint-Père poursuit: «Demandons
au Seigneur de délivrer l’Église des personnes qui veulent la faire vieillir,
la scléroser dans le passé, la figer, l’immobiliser. […] Non! Elle est jeune
quand elle est elle-même, quand elle reçoit la force toujours nouvelle de la
Parole de Dieu, de l’Eucharistie, de la présence du Christ et de la force de
son Esprit chaque jour. Elle est jeune quand elle est capable de retourner
inlassablement à sa source».
Puis le Souverain Pontife se fait le
porte-parole des jeunes, en rapportant leur point de vue: «même s’il y
a des jeunes qui se réjouissent de voir une Église se montrant humblement sûre
de ses dons et de sa capacité de faire une critique loyale et fraternelle,
d’autres jeunes réclament une Église qui écoute davantage, qui ne soit pas
toujours à condamner le monde. Ils ne veulent pas voir une Église silencieuse
et timide, ni toujours en guerre sur deux ou trois thèmes qui l’obsèdent. […]
Une Église sur la défensive, qui n’a plus l’humilité, […] perd la jeunesse et
devient un musée».
Dans les souffrances, proposer la
consolation du Seigneur
Le Pape met ensuite en avant la Vierge
Marie, «le grand modèle pour une Église jeune, qui veut suivre le
Christ avec courage et docilité», et plusieurs figures de saints jeunes,
dans des pages rappelant l’invitation à la sainteté lancée par François dans sa
précédente exhortation apostolique, Gaudete et Exsultate.
Puis comment ne pas percevoir un écho
des paroles prononcées lors des dernières Journées Mondiales de la Jeunesse,
lors de la messe finale à Panama, lorsque s’ouvre le troisième chapitre? «Après
avoir consulté la Parole de Dieu, nous ne pouvons pas seulement dire que les
jeunes sont l’avenir du monde. Ils sont le présent, ils l’enrichissent par leur
contribution», affirme le Souverain Pontife, qui tente dans les paragraphes
suivants de répondre à cette question: «Comment sont les jeunes
aujourd’hui, qu’est-ce qui leur arrive à présent ?». Un regard «positif» sur
la jeunesse est d’abord posé et promu. Toutefois, conscient de la diversité des
cultures et des situations, le Pape ne souhaite pas «fournir une
analyse exhaustive sur les jeunes dans le monde actuel». Il préfère
présenter «brièvement certaines contributions parvenues avant le
Synode, et d’autres que j’ai pu recueillir au cours du Synode même».
Plusieurs thèmes, souvent douloureux,
sont alors abordés, en premier lieu les diverses violences subies par les
jeunes, les «formes de marginalisation et d’exclusion sociale, pour des
raisons religieuses, ethniques ou économiques». «Parfois, la souffrance de
certains jeunes est vraiment déchirante; c’est une souffrance qu’on ne peut pas
exprimer par des paroles; c’est une souffrance qui nous gifle», relève le
Saint-Père. «Mais dans cette plainte déchirante se font présentes les
paroles de Jésus: “Heureux les affligés, car ils seront consolés”(Mt 5, 4). […]
Puisse-t-il y avoir toujours auprès d’un jeune qui souffre une communauté
chrétienne capable de faire résonner ces paroles par des gestes, des accolades
et des aides concrètes», écrit-il.
Le Pape dénonce aussi la tendance de la
culture actuelle à présenter «un modèle de personne très associé à
l’image du jeune. Se sent beau celui qui a l’air jeune, qui fait des
traitements pour faire disparaître les traces du temps. Les corps jeunes sont
constamment utilisés dans la publicité pour vendre. […] Cela signifie seulement
que les adultes veulent voler la jeunesse pour eux-mêmes; non pas qu’ils
respectent, aiment et prennent soin des jeunes», met-il en garde.
Internet, migrations, abus… faire face à
des défis majeurs
Dans quelques paragraphes dédiés
aux «Désirs, blessures et recherches», le Pape aborde un sujet sur
lequel les attentes des jeunes sont importantes: le corps et la sexualité, qui
revêtent «une importance essentielle pour leur vie et pour le chemin de
croissance de leur identité. Cependant, dans un monde qui souligne à l’excès la
sexualité, il est difficile de garder une bonne relation avec son corps et de
vivre sereinement les relations affectives. Pour cette raison, et pour
d’autres, la morale sexuelle tend très souvent à être “une cause fréquente
d’incompréhension et d’éloignement par rapport à l’Église, dans la mesure où
elle est perçue comme un espace de jugement et de condamnation”», observe
le Pape.
Puis François approfondit «trois
thèmes d’une grande importance», traités lors du Synode.
Le monde numérique
Le Pape se montre préoccupé par les
dérives de l’utilisation d’Internet et des réseaux sociaux, et identifie «un
nouveau défi» auquel sont confrontés les jeunes: «interagir
avec un monde réel et virtuel dans lequel ils pénètrent seuls comme dans un
continent global inconnu. Les jeunes d’aujourd’hui sont les premiers à faire
cette synthèse entre ce qui est personnel, ce qui est propre à chaque culture
et ce qui est global. C’est pourquoi il faut qu’ils parviennent à passer du
contact virtuel à une bonne et saine communication», souligne-t-il.
Les migrants
Concernant les migrants, «paradigme
de notre temps» et sujet cher au Souverain Pontife, un appel est
adressé aux plus jeunes d’entre eux. François leur demande «de ne pas
se laisser enrôler dans les réseaux de ceux qui veulent les opposer à d’autres
jeunes qui arrivent dans leurs pays, en les présentant comme des êtres
dangereux et comme s’ils n’étaient pas dotés de la même dignité inaliénable
propre à chaque être humain».
Le combat contre les abus
Enfin, dans une partie intitulée «Mettre
fin à tout genre d’abus», le Pape redit sa détermination et celle de toute
l’Église à lutter contre ce fléau; il exprime sa gratitude envers ceux qui
dénoncent «le mal subi», ou qui «chaque jour, se dépensent
avec honnêteté et dévouement au service des jeunes. Leur œuvre est une forêt
qui grandit sans faire de bruit», peut-on lire. Une nouvelle fois, le
Saint-Père se tourne vers les jeunes. «Grâce à Dieu, les prêtres qui
commettent ces horribles crimes ne constituent pas la majorité qui exerce un
ministère fidèle et généreux. Je demande aux jeunes de se laisser stimuler par
cette majorité. En tout cas, quand vous voyez un prêtre en danger, parce qu’il
a perdu la joie de son ministère, parce qu’il cherche des compensations
affectives ou qu’il est en train de perdre le cap, ayez le courage de lui
rappeler son engagement envers Dieu et avec son peuple, annoncez-lui,
vous-mêmes, l’Évangile, et encouragez-le à rester sur le bon chemin. Ainsi,
vous offrirez une aide inestimable pour une chose qui est fondamentale : la
prévention qui permet d’éviter que ces atrocités se répètent. Ce nuage noir
devient aussi un défi pour les jeunes qui aiment Jésus-Christ et son Église
[…]».
François tient toutefois à pointer un
horizon lumineux en «ce moment difficile», qui «avec l’aide
précieuse des jeunes, peut véritablement être l’occasion d’une réforme de
portée historique, pour déboucher sur une nouvelle Pentecôte et inaugurer une
étape de purification et de changement qui confère à l’Église une nouvelle
jeunesse».
Le chapitre se conclut sur l’espérance,
proposée plus personnellement aux jeunes. Une espérance incarnée par le
Christ. «Si tu es jeune en âge, mais si tu te sens faible, fatigué ou
désabusé, demande à Jésus de te renouveler. Avec lui, l’espérance ne manque
pas. Tu peux faire de même si tu te sens submergé par les vices, les mauvaises
habitudes, l’égoïsme ou le confort malsain. Jésus, plein de vie, veut t’aider
pour qu’être jeune en vaille la peine. Ainsi tu ne priveras pas le monde de
cette contribution que toi seul peux lui apporter, en étant unique et hors pair
comme tu es», écrit le Pape.
Les conseils du Pape aux jeunes
Les trois chapitres suivants – “La
grande annonce pour tous les jeunes”, “Chemins de jeunesse”, “Des jeunes avec
des racines” – constituent une partie originale mais non moins
marquante de cette Exhortation apostolique. Le Souverain Pontife parle de cœur
à cœur avec les jeunes. Il leur propose de précieux points de repères pour
divers aspects de leur vie – spirituelle, professionnelle et relationnelle. Là
encore, le Pape montre son attention envers les jeunes, sa connaissance des
réalités qu’ils vivent. Il s’adresse à eux en père et en ami, tendre mais
exigeant. On y retrouve les images concrètes et fortes fréquemment employées
dans ses discours aux jeunes. En témoigne l’emblématique paragraphe 143: «Ne
survivez pas avec l’âme anesthésiée, et ne regardez pas le monde en touristes.
Faites du bruit! Repoussez dehors les craintes qui vous paralysent, afin de ne
pas être changés en jeunes momifiés. Vivez! Donnez-vous à ce qu’il y a de mieux
dans la vie! Ouvrez la porte de la cage et sortez voler! S’il vous plaît, ne
prenez pas votre retraite avant l’heure !».
Le Pape insiste également sur «l’amitié
avec le Christ», qui doit devenir un pilier de la vie du jeune. «Bien
que tu vives et fasses des expériences, tu ne parviendras pas à la pleine
jeunesse, tu ne connaîtras pas la véritable plénitude d’être jeune, si tu ne
rencontres pas chaque jour le grand ami, si tu ne vis pas dans l’amitié de
Jésus», peut-on lire. Une amitié qui grandit et s’entretient par la
prière. «La prière est un défi et une aventure. […] La prière nous
permet de lui dire tout ce qui nous arrive et de rester confiants dans ses
bras, et en même temps elle nous offre des instants de précieuse intimité et
d’affection, où Jésus répand en nous sa propre vie», explique François.
Transformer le monde en restant
enracinés
Puis le Saint-Père invite les jeunes à
l’engagement, car «toujours il est bon et opportun de partager la joie
de l’Évangile. C’est ainsi que le Seigneur va chercher tout le monde. Et vous,
jeunes, il veut que vous soyez ses instruments pour répandre lumière et
espérance, car il veut compter sur votre audace, votre courage et votre
enthousiasme». Des jeunes entrainés vers le dur mais fécond sentier du
dépassement… «Il ne faut pas espérer que la mission soit facile et
confortable. Certains jeunes ont donné leur vie afin de ne pas arrêter leur
élan missionnaire». «Chers amis, n’attendez pas demain pour collaborer à la
transformation du monde avec votre énergie, votre audace et votre créativité.
Votre vie n’est pas un “entre-temps”», rappelle le Pape.
Celui-ci dédie ensuite un chapitre au
thème de l’enracinement, qui lui tient à cœur. Il met en garde la jeunesse
contre les manipulateurs et les «idéologies de toutes les couleurs, qui
détruisent (ou dé-construisent) tout ce qui est différent et qui, de cette
manière, peuvent régner sans opposition. Pour cela elles ont besoin de jeunes
qui méprisent l’histoire, qui rejettent la richesse spirituelle et humaine qui
a été transmise au cours des générations, qui ignorent tout ce qui les a
précédés». «Si nous marchons ensemble, jeunes et vieux, nous
pourrons être bien enracinés dans le présent, et, de là, fréquenter le passé et
l’avenir», soutient le Pape. «Les racines ne sont pas des ancres
qui nous enchaînent à d’autres époques […] Elles sont, au contraire, un point
d’ancrage qui nous permet de nous développer et de répondre à de nouveaux
défis».
Des réserves à l’égard de certaines
formes de pastorale
Au début du septième chapitre, le Pape
estime que la pastorale des jeunes «a souffert de l’assaut des
changements sociaux et culturels». Cependant, François ne souhaite
pas «proposer une sorte de manuel de pastorale des jeunes ou un guide
de pastorale pratique», mais seulement «mettre en jeu
l’intelligence, l’ingéniosité et la connaissance que les jeunes eux-mêmes ont
de la sensibilité, de la langue et des problématiques des autres jeunes».
Ce qui n’empêche pas le Pape de
prévenir: «La pastorale des jeunes doit acquérir une autre flexibilité,
et réunir les jeunes pour des évènements […] qui leur permettent aussi […] de
faire l’expérience de la rencontre communautaire avec le Dieu vivant. D’autre
part, il serait particulièrement souhaitable de recueillir encore plus de
bonnes pratiques: ces méthodologies, ces motivations, ces langages qui ont été
réellement attractifs pour conduire les jeunes au Christ et à l’Église. Peu
importe leur couleur, qu’ils soient "conservateurs ou progressistes",
qu’ils soient "de droite ou de gauche". Le plus important est que
nous recueillons tout ce qui a donné de bons résultats et ce qui est efficace
pour communiquer la joie de l’Évangile».
En bref, «la pastorale des
jeunes ne peut être que synodale, autrement dit, constituer un "marcher
ensemble"». Elle a deux axes principaux: «l’un est
l’approfondissement du kérygme, l’expérience fondatrice de la rencontre avec
Dieu par le Christ mort et ressuscité. L’autre est la croissance de l’amour
fraternel, dans la vie communautaire, par le service».
François formule ensuite une mise en
garde. Aux jeunes, on offre parfois «seulement des réunions de
"formation" où sont uniquement abordées des questions doctrinales et
morales […]. Le résultat est que beaucoup de jeunes s’ennuient, perdent le feu
de la rencontre avec le Christ et la joie de le suivre, beaucoup abandonnent le
chemin et d’autres deviennent tristes et négatifs», note-t-il. Le
Saint-Père se montre également réservé vis-à-vis de «certains collèges
catholiques» qui «semblent être organisés seulement pour leur
préservation. […]. L’école transformée en “bunker” qui protège des erreurs “de
l’extérieur”, est l’expression caricaturale de cette tendance. Cette image
reflète d’une manière choquante ce que beaucoup de jeunes éprouvent à la sortie
de certains établissements éducatifs: une inadéquation insurmontable entre ce
qu’ils ont appris et le monde dans lequel ils doivent vivre. Même les
propositions religieuses et morales qu’ils ont reçues ne les ont pas préparés à
les confronter avec un monde qui les ridiculise, et ils n’ont pas appris
comment prier et vivre leur foi d’une manière qui puisse être facilement
soutenue au milieu du rythme de cette société».
Pour une Église ouverte à tous
Le Pape termine ce chapitre en
développant une réflexion sur la «“pastorale populaire des jeunes”, qui
ait un autre style, d’autres temps, un autre rythme, une autre méthode». Un
forme de pastorale fortement encouragée par François, et qui «consiste
en une pastorale plus ample et plus flexible qui stimule, dans les différents
lieux où les jeunes se déplacent, ces leaderships naturels et ces charismes que
l’Esprit Saint a déjà semés en eux».
Dans cette partie se trouve aussi un
véritable plaidoyer en faveur d’une «Église aux portes ouvertes». «Une
attitude d’ouverture suffit pour tous ceux qui ont le désir et la volonté de se
laisser trouver par la vérité révélée par Dieu, écrit François. Certaines
propositions pastorales peuvent supposer un chemin déjà parcouru dans la foi,
mais nous avons besoin d’une pastorale populaire des jeunes qui ouvre des
portes et offre un espace à tous et à chacun avec ses doutes, ses traumatismes,
ses problèmes et sa recherche d’identité, avec ses erreurs, son histoire, ses
expériences du péché et toutes ses difficultés».
Par conséquent, il «doit
également y avoir de la place pour tous ceux qui ont d’autres conceptions de la
vie, professent une foi différente ou se déclarent étrangers à l’horizon
religieux. Tous les jeunes, sans aucune exception, sont dans le cœur de Dieu et
donc dans le cœur de l’Église», soutient le Souverain Pontife.
Accomplir sa propre vocation: la famille
mise en valeur
Enfin, les deux derniers chapitres de
l’exhortation correspondent à deux sujets principaux du dernier Synode: “la
vocation” et “le discernement”.
Le Pape rappelle aux jeunes la
signification de la vocation et de sa réalisation. «Pour accomplir sa
propre vocation, il est nécessaire de développer, de faire pousser et grandir
tout ce que l’on est. Il ne s’agit pas de s’inventer, de se créer spontanément
à partir de rien, mais de se découvrir soi-même à la lumière de Dieu et de
faire fleurir son propre être», souligne-t-il. Par ailleurs, note
François, «certaines jeunes femmes estiment qu’elles ont besoin de plus
d’exemples de leadership féminin au sein de l’Église et elles désirent avec
leurs dons intellectuels et professionnels participer à l’Église».
Sont également rapportées les attentes
formulées par les jeunes vis-à-vis des accompagnateurs spirituels. Ces derniers
ne devraient pas être des modèles lisses, ils «ne devraient pas
conduire les jeunes comme s’ils étaient des sujets passifs mais marcher avec
eux en leur permettant d’être acteurs de leur cheminement. Ils devraient
respecter la liberté des jeunes qu’ils rencontrent sur leurs chemins de
discernement et les équiper pour discerner en leur donnant les outils utiles
pour avancer», écrit notamment François.
Puis un fort accent est mis sur le
mariage et la famille, même si cela signifie d’aller à contre-courant. «Aujourd’hui
règne une culture du provisoire qui est une illusion. Croire que rien ne peut
être définitif est une tromperie et un mensonge», affirme le
Saint-Père. «Moi, au contraire, je vous demande d’être
révolutionnaires, je vous demande d’aller à contre-courant; oui, en cela je
vous demande de vous révolter contre cette culture du provisoire, qui, au fond,
croit que vous n’êtes pas en mesure d’assumer vos responsabilités, elle croit
que vous n’êtes pas capables d’aimer vraiment. J’ai confiance en vous, et
pour cela je vous encourage à opter pour le mariage», encourage-t-il.
L’importance du travail est également
rappelée. Le travail «définit et affecte l’identité et l’estime de soi
d’un jeune adulte et c’est un lieu fondamental où se développent des amitiés et
d’autres relations parce que, généralement, on ne travaille pas seul». Là
aussi le Pape apporte son soutien aux jeunes: «Il est vrai que tu ne
peux pas vivre sans travailler et que parfois tu dois accepter ce que tu
trouves, mais ne renonce jamais à tes rêves, n’enterre jamais définitivement
une vocation, ne te donne jamais pour vaincu ».
Enfin, plus brièvement, sont abordées
les vocations à une consécration particulière. À ce propos, François explique
aux jeunes qu’«il ne faut pas exclure la possibilité de se consacrer à Dieu
dans le sacerdoce, dans la vie religieuse ou dans d’autres formes de
consécration. Pourquoi l’exclure? Sois certain que, si tu reconnais un
appel de Dieu et que tu le suis, ce sera ce qui te comblera».
Des recommandations pour mieux discerner
Dans le neuvième et dernier chapitre sur
le discernement, le Pape s’adresse bien sûr aux jeunes, par des conseils – les
questions à se poser, par exemple – et des encouragements – «avant
toute loi et tout devoir, ce que Jésus nous propose pour choisir est le fait de
suivre, comme le font des amis qui se suivent et se cherchent et se trouvent
par pure amitié. Tout le reste vient après, et même les échecs de la vie
peuvent être une expérience inestimable de cette amitié qui jamais ne se brise».
Les accompagnateurs sont pris en compte. Le Souverain Pontife leur demande de
développer trois sensibilités: attention «à la personne» - comme
le Seigneur aux côtés des disciples d’Emmaüs -, attention dans le discernement
– «Il s’agit d’épingler le moment précis où l’on discerne la grâce ou
la tentation»-, écoute des «impulsions que l’autre expérimente “en
avant”». François insiste sur la nécessité «de susciter et
d’accompagner des processus, et non pas d’imposer des parcours. Et ce sont des
processus de personnes qui sont toujours uniques et libres».
La conclusion de l’exhortation Christus
vivit est brève, en forme de désir exprimé par le Saint-Père à ses
principaux destinataires. «Chers jeunes, je serai heureux en vous voyant
courir plus vite qu’en vous voyant lents et peureux. Courez, attirés par ce
Visage tant aimé, que nous adorons dans la sainte Eucharistie et que nous
reconnaissons dans la chair de notre frère qui souffre. Que l’Esprit Saint vous
pousse dans cette course en avant. L’Église a besoin de votre élan, de vos
intuitions, de votre foi. Nous en avons besoin! Et quand vous arriverez là où
nous ne sommes pas encore arrivés, ayez la patience de nous attendre»,
demande-t-il, reprenant les mots d’un discours prononcé devant des jeunes à
Rome, au mois d’août dernier.
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles