samedi 28 novembre 2020

Après Jésus : l'invention du christianisme


 Après Jésus : L'invention du christianisme (octobre 2020

Sous la direction de Antoine Guggenheim et de Roselyne Dupont-Roc ; avec une posface de Marcel Gauchet

Paris, Albin Michel, 2020. 700 pages

 


 

Jésus n'a laissé aucun écrit, il se référait aux Ecritures juives. Il n'a institué ni religion, ni credo, ni clergé, et encore moins une quelconque  théologie morale ou politique, et ni rite, hormis un repas « en mémoire de lui », et une prière, le « notre Père ». Comment ses disciples ont-ils donc fait pour exprimer et mettre en pratique leur foi en lui ? Comment ont-ils prié, communiqué entre eux, interagi avec les peuples qu'ils côtoyaient ? Tout cela restait à inventer... Le tout premier christianisme était sans image, sans « Nouveau Testament », sans prêtres, sans pape... et pendant plus de deux siècles il y eut des communautés chrétiennes très diverses, voire divergentes, certaines proches du judaïsme, d'autres le rejetant absolument. Il faudra beaucoup de temps pour qu'émerge une Eglise unifiée autour d'un début d'orthodoxie et que le christianisme s’éloignera du judaïsme. C'est alors, en 250, que les chrétiens subiront la première persécution générale dans un Empire en pleine crise.

Ce temps des commencements encore trop peu connu, ce temps tumultueux de tous les possibles est ici reconstitué de façon accessible et vivante par 80 des meilleurs spécialistes des premiers siècles de notre ère. 

 

 

Biographie des auteurs

Roselyne Dupont-Roc, normalienne, est titulaire de l'agrégation de grammaire, d'une licence canonique en théologie, du diplôme supérieur d'études bibliques et du diplôme supérieur de l'Ecole des langues et civilisations de l'Orient ancien. De 1987 à 2011, elle a enseigné le grec et l'exégèse du Nouveau Testament à la faculté de théologie de l'Institut catholique de Paris. Elle a notamment traduit avec Jean Lallot La Poétique d'Aristote (préface de Tzvetan Todorov, Le Seuil, 1980).

Antoine Guggenheim a été président de la Faculté Notre-Dame de Paris (2000-2006) et de son cycle doctoral (2006-2014). Fondateur et directeur du pôle de recherche du Collège des Bernardins de 2007 à 2014, il a été professeur invité aux universités de Fudan et Jiao Tong de Shanghai (Chine, 2015). Membre du comité éditorial de la revue des Etudes du Crif et membre associé du Centre d'études universitaires Emmanuel-Levinas (Paris IV-Sorbonne), il est également cofondateur et responsable scientifique de UP for Humanness (2016). Il a notamment publié La Circoncision : circoncision de la chair, circoncision du cœur . Une lecture de saint Paul (L'Herne, 2016), et dirigé avec Danielle Cohen-Levinas L'Antiju-daïsme à l'épreuve de la philosophie et de la théologie (Le Seuil, 2016).


Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles

 

vendredi 20 novembre 2020

A Marseille, l'Eglise pendant la Grande Peste de 1720-1722

 

L’Eglise à Marseille pendant la peste de 1720-1722

 


 

        Les années 1720-1722  resteront  gravées pour longtemps dans les esprits en Provence car cette l’épidémie qui va ravager la Provence jusqu’au Languedoc.  L’année 2020 qui devait être celle de la commémoration de cet évènement est surtout marquée par une autre pandémie : la Covid-19 touche le monde entier. De ces deux évènements, à trois cents ans d’intervalle, on peut y trouver des similitudes : intervention du pouvoir central pour gérer l’épidémie, quarantaine (confinement) pour la population, contrôle de la circulation des personnes, interdiction de certaines activités…. L’histoire de cette épidémie en Provence a fait l’objet de nombreuses publications : livres, articles divers … Sans faire de rapprochements anachroniques on peut cependant en dégager quelques constantes en suivant les évènements centrés sur la ville de Marseille puisque c’est l’arrivée du navire du Grand Saint-Antoine dans le port en mai 1720 a provoqué cette catastrophe. L’accent a beaucoup été mis sur la personne de Mgr Henri de Belsunce, l'évêque de Marseille,  et son rôle durant ces années : mais au-delà des images d’épinal il faut voir aussi d’autres réalités qui ne sont pas sans quelque rapport avec la situation actuelle : la fermeture des églises avec ses conséquences et la gestion des sépultures ; ceci  a été abondamment commenté depuis le début de la parution du Covid-19 en Europe parce que vécu comme un traumatisme  

 

 

Rappel des faits

         La peste de Marseille de 1720, dernière grande épidémie en France, fut propagée à partir du bateau le Grand-Saint-Antoine qui accoste à Marseille, en provenance du Levant (Syrie), le 25 mai 1720. Sa cargaison constituée d’étoffes et de balles est contaminée par le bacille de la peste. Suite à des négligences de la part des responsables du bureau de santé du port et malgré la mise en quarantaine des passagers et des marchandises, la peste se propage dans Marseille puis dans toute la Provence jusqu’au Languedoc.  Les quartiers les plus anciens et les plus déshérités sont les plus touchés. L’épidémie fera entre 30 000 et 40 000 décès sur une population de 80 000 à 90 000 habitants. Dans toute la Provence on compte environ 90 000 et 120 000 victimes sur les 400 000 habitants

 



         Le  commandant du navire, le capitaine Jean-Baptiste Chataud et le premier échevin, Jean-Baptiste Estelle furent accusés de ne pas avoir respecté la réglementation sanitaire  pour les navires potentiellement infectés bien qu’aucune preuve ne put être établie. Cependant  les échevins et les intendants de santé chargés de cette réglementation faisant preuve de beaucoup d’imprudence ont laissé débarquer à Marseille des marchandises, surtout des étoffes, qui auraient dues être mises en quarantaine.

         Lors de l’épidémie, l'alimentation de la population, l’enlèvement des cadavres vont mobiliser toute l’énergie des échevins de 1720 à 1722. Deux personnalités émergent durant cette période : le chevalier Nicolas Roze pour l’enlèvement des cadavres et celle de Mgr de Belsunce qui avec les prêtres et les religieux apportent un réconfort moral et spirituel aux mourants

 

 

Marseille ville catholique

 


Marseille au XVIIIè siècle

 

         Marseille est une grande ville portuaire. Au-delà de cette activité qui en fait la richesse cette grande ville est aussi une ville catholique à la piété exubérante.  Les minorités juives ou protestantes  sont de peu d’importance ; les juifs se font discrets ; les protestants, depuis la Révocation de l’Edit de Nantes (16 octobre 1685) par Louis XIV forment ce que l’on appelle les “Nouvaux convertis” ou pour ce qui est des plus obstinés ils sont dans les Galères du Roi . La vitalité de l’Eglise se remarque dans l’importance numérique du clergé, les nombreux couvents. Et Marseille c’est aussi un diocèse depuis le Ier siècle. En 1720 c’est Mgr Henri de Belsunce qui en est l’évêque depuis 1710 et il le restera jusqu’à sa mort en 1755.

 

 

Qui était Monseigneur Henri de Belsunce l’évêque de Marseille ?

 


Portrait de Mgr  de Belsunce

 

         Henri-François-Xavier de Belsunce de Castelmoron naquit en décembre 1671, au château de la Force, en Périgord. Il était le second fils d'Armand de Belsunce, marquis de Castelmoron, baron de Gavaudun, seigneur de vieille-ville et de Born, grand sénéchal et gouverneur des provinces d'Agenais et de Condomais, et de Anne Nompar de Caumont de Lauzun, sœur  de Antonin Nompar de Caumont, le célèbre duc de Lauzun.

         Elevé dans la religion réformée, il opta à l'âge de 16 ans pour le catholicisme. Il fit ses études au collège Louis le Grand et entra chez les jésuites qu'il quitta en 1701et fut ordonné prêtre en 1703

Après avoir été vicaire général du diocèse d'Agen, le roi le nomma à l'évêché de Marseille le 5 avril 1709 et le Pape le proclama le 19 février 1710. Il resta évêque de Marseille pendant 45 ans jusqu'à sa mort en 1755.

         En 1713, le Pape Clément XI condamne dans la bulle Unigenitus un livre du P.Quesnel de l'Oratoire estimant qu'il renfermait des erreurs. Conformément à sa formation au collège des jésuites, Belsunce accepta la bulle et s'opposa vigoureusement à ceux qui en appelèrent au Pape, dénommés "Appelants", surtout aux Oratoriens. auxquels il interdit l'exercice de la prédication et aussi l'administration des sacrements. Dans ces querelles contre le jansénisme, il se prononça fortement contre ce mouvement et s'attira par là de vifs démêlés avec le Parlement d’Aix dans une région où ces thèses étaient défendues par certains membres de magistrats ou de prêtres.

         L'évènement qui devait marquer pour toujours l'épiscopat de Mgr. de Belsunce fut la grande Peste de Marseille de 1720. Si son attitude pendant cette période fut objet de controverses, tous souligneront son dévouement infatigable auprès des malades. Il multiplia les gestes spectaculaires : exorcisme du fléau du haut du clocher des Accoules, des processions, consécration de la ville au Sacré-Coeur pendant une messe célébrée le 1er novembre 1720 sur le cours qui porte son nom. À cette occasion, Belsunce déclara : « A Dieu ne plaise que j'abandonne une population dont je suis obligé d'être le père. Je lui dois mes soins et ma vie, puisque je suis son pasteur. »

         Après la fin de la contagion pour le récompenser de son dévouement le Régent le nomma en octobre 1723 à l'évêché de Laon mais il refusa préférant rester à Marseille au milieu de ceux  qui avaient connu les terribles épreuves de la peste.

         En 1726 Belsunce assista au synode provincial d'Embrun réuni pour condamner les opinions jansénistes de Soanen, évêque de Senez. Après 1730 il procède à une surveillance étroite de l'enseignement primaire et secondaire. Il favorise les jésuites et leur nouveau collège qui porte son nom.

         La présence de la franc-maçonnerie à Marseille est décelée par l'évêque en 1737, qui écrit un mandement daté du 28 septembre à l’intention de l’intendant de police, en ces termes : "Je ne sais, Monsieur, ce que sont les Francmaçons (sic), mais je sais que ces sociétés sont pernicieuses à la religion et à l’Etat".

Il a été abbé commanditaire non résidant de l'abbaye des Chambons dans le Vivarais. Membre de l'académie de Marseille, il assiste à plusieurs réunions en particulier à celle du 12 janvier 1746 qui accepte Voltaire comme membre associé.

         Il mourut à Marseille le 4 juin 1755. La ville lui fit des funérailles grandioses. Il institua l'hôpital de la Grande Miséricorde de Marseille, son légataire universel. Il fit quelques donations particulières aux jésuites qui héritèrent de sa bibliothèque, à ses domestiques, aux indigents et à ses parents.

 

 

 

Un clergé face à la Peste

 



 

 

 

Les jansénites coupables de la peste de Marseille ?



Carte représentant les principaux foyers où est implanté le jansénisme

 

         Il fallait trouver des coupables à ce grand malheur qui tombe sur la ville et la région. Ils furent vite désignés : ce fut pour l’évêque de Marseille, tout comme pour son collègue d’Arles, Mgr Jacques de Forbin-Janson, les jansénistes. En effet les thèses jansénistes malgré la bulle Unigenitus promulgué par le pape Clément XI en 1713  qui les excommuniait, étaient très répandues en Provence : les membres du Parlement d’Aix et les Oratoriens implantés à Marseille en sont proches.  Ceux qui rejettent la Bulle Unigenitus sont appelés “les appellants” et sont exclus des sacrements et ne peuvent bénéficier d’une sépulture religieuse.

         Pour Mgr de Belsunce : “Dieu irrité veut punir les péchés du peuple et en particulier, le mépris des censures et des excommunications de l’Eglise, le peu de respect, de soumission pour les pontifes de Dieu”. Ou encore : Si le mal continue d’augmenter… je suis bien tenté de denoncer alors excommuniés tous les appellants dont les sacrilèges multiplies sont, je crois, la principale cause de la peste qui nous consterne”. Que faut-il pour sauver la ville ? : “Une entière soumission d’esprit et de coeur aux sacrées décisions de l’Eglise, moyens sûrs et unique d’arrêter le bras d’un Dieu irrité”. C’est pourquoi il refusera que les Oratoriens présents dans la ville puissent assister les mourants en leur donnant  les sacrements.

         De son côté Mgr  Forbin de Janson au début de l’épidémie de 1720-1722  appelle  « la vengeance du tout puissant sur tous ceux qui ont le tort de ne pas se conformer aux prescriptions de la bulle « Unigenitus »,

 

 

Calmer la colère de Dieu ? Implorer la miséricorde de Dieu ?


 


         Si les premiers cas de peste se manifestent dès le 20 juin 1720 il faudra attendre le 9 juillet pour que les médecins donnent leur diagnostic : c’est la peste. Les premières mesures sont prises pour isoler les maladies et le Parlement d’Aix isole la ville de Marseille par un cordon sanitaire le  31 juillet et ordonne fin août 1720 la fermeture des églises avant que, le 14 septembre 1720, le Conseil d’Etat ordonne le blocus de la ville et envoie des troupes pour faire appliquer les décisions prises.

En premier lieu Mr de Belsunce organisa des processions et demanda que l’on fasse des prières publiques. Ainsi le 15 juillet 1720 il promulgue une ordonnance pour des prieres à Saint Roch ; le 29 juillet il réunit au Palais épiscopal  les curés,  les supérieurs des communautés de religieux de la ville pour évaluer la situation. Le 30 du même mois il publie un mandement « ordonnant des prières publiques et un jeûne général pour apaiser la colère du Seigneur ». Il y réaffirme que « c’est le Dieu terrible, le Dieu de justice, mais c’est en même temps le Dieu de paix et de bonté qui nous châtie, qui ne nous afflige que pour nous engager à retourner à lui dans la sincérité de nos cœurs ». Mais le même jour les échevins recommandent de ne plus faire de processions.  Quand le 25 août toutes les églises seront fermées les prêtres continueront cependant à dire des messes et organiser des prières publiques sous les porches des églises. Mais rapidement devant le taux de mortalité (environ 1 000 personnes par jour) ces réunions publiques très fréquentées devenant des foyers d’infection sont également prohibées par les autorités locales. Par conséquent on peut dire que durant la période de août 1720 au mois d’août 1722 il n’y eut plus  de messes, de processions et encore moins d célébrations de baptêmes, de mariages et encore moins d’enterrements

         Le 8 septembre, jour de la Nativité de la Vierge, les échevins de la ville invitent  Mgr de Belsunce à venir à l’hôtel de ville pour qu’il y célèbre la messe et reçoive le vœu qu’ils ont décidé de faire au nom de la ville. « Considér[an]t que la peste étant un fléau de la colère de Dieu, tous les secours des hommes et tous les efforts qu’ils ont résolu de faire seront vains et inutiles s’ils n’ont recours à sa miséricorde pour tâcher de la fléchir », ils s’engagent à donner chaque année à perpétuité 2000 livres à l’hôpital le plus récemment établi, en 1713, celui des orphelines, qui est sous le vocable de Notre-Dame de Bon-Secours.

         Durant une accalmie de la peste (l’hiver 1720-1721) Mgr de Belsunce fait un geste spectaculaire que cite Chateaubriand dans ses Mémoires d’Outre-Tombe :: " Quand la contagion commença à se ralentir, Mgr Belsunce a la tête de son clergé, se transporta à l’église des Accoules : monté sur une esplanade d’où l’on découvrait Marseille, les campagnes, les ports et la mer, il donna la bénédiction, comme le pape à Rome, bénit la ville et le monde : quelle main plus courageuse et plus pure pouvait faire descendre sur tant de malheurs les bénédictions du ciel ? »







Le 1er novembre, jour de la Toussaint, sur les conseil de Anne-Madeleine Remusat, visitandine, tout en bravant les consignes des échevins opposés à tout rassemblement public susceptible de propager la peste, l’évêque au cours d’une cérémonie publique sur le cour qui porte aujourd’hui son nom consacra la ville de Marseille et son diocèse au Sacré-Coeur de Jésus et institua la fête du Sacré-Coeur comme fête d’obligation . « J’espère que le Cœur de Jésus aura été touché des larmes du pasteur et du troupeau réunis pour apaiser sa colère », écrit-il. A cet effet il traversa Marseille, pieds nus, sans mitre et corde au cou comme l’avait fait saint Charles Borromée pendant la peste de Milan en 1576. Il fit d’autre part imprimer et diffuser de petites images du Sacré-Cœur appelées garde-fous : de petits morceaux de tissu rouge, sur lesquels le Cœur était imprimé avec cette inscription : « Cœur de Jésus, abîme d'amour et de miséricorde, je place toute ma confiance en vous et j'espère pour toute votre bonté."

 


Vitrail à la Basilqiue du Sacré-Coeur : Consécration de la ville de Marseille au Sacré-Coeur de Jésus

 

 

Mgr de Belsunce sur les pas de Charles de Borromée


Michel Serre, Vue de l’hôtel-de-Ville pendant la peste de 1720, Musée des Beaux-Arts de Marseille, détail.

À la fin de l’été 1720, la situation était désespérée : en trois mois, la ville avait été réduite de moitié, avec quarante mille morts. « Il y aura dans moins de huit jours, écrit un contemporain, quinze mille cadavres sur le pavé, tous pourris, par où on sera tout à fait contraint de sortir de la ville et de l’abandonner peut-être pour toujours à la pourriture, au venin et à l’infection qui y croupira. » (Praviel, p. 149). Tel était l’état la ville où Mgr de Belsunce allait exercer sonn activité pastorale.

 Durant toute cette période Mgr de Belsunce ne se contenta pas d’organiser des processions ou des prières publiques comme il ne resta pas enfermé dans son palais épiscopal qu’il dut quitter le 14 septembre 1720,  la rue étant infestée de cadavres abandonnés, pour aller loger chez l’intendant de la ville Monsieur Lebret. Grâce à son autorité et à son exemple de nombreux prêtres qui avaient quitté la ville revinrent à Marseille où ils assistèrent les mourants en leur donnant, quand cela était possible,  les derniers sacrements afin qu’ils “ne maudissent pas Dieu”in extremis. Il faut noter que certains ne suivirent pas cet exemple : ainsi les moines de Saint-Victor, les religieuses visitandines se mirent à l’abri derrière leurs murs se contentant d’envoyer des aumônes ; quant aux chanoines de Saint-Martin ils quittèrent la ville pour aller se réfugier à la campagne.

 

On peut suivre son activité presque jour après jour grâce aux notes laissées par l’Abbé Goujon, son secrétaire. Un témoin a pu aussi laisser ce témoignage : « Belsunce ne se borne pas à rester prosterné au pied des autels et à lever les mains au Ciel pour demander à Dieu la grâce de vouloir apaiser sa colère. » Après avoir prescrit des prières publiques, « sa charité est active ». Ayant exhorté son clergé à ne pas craindre la contagion, il donne lui-même l’exemple d’un dévouement héroïque : « Il est tous les jours sur le pavé, dans tous les quartiers de la ville, et va partout visiter les malades [...]. Les plus misérables, les plus abandonnés, les plus hideux, sont cesont ceux auxquels il va avec le plus d’empressement et sans craindre ces souffles mortels qui portent le poison dans les cœurs. Il les approche, les confesse, les exhorte à la patience, les dispose à la mort, verse dans leurs âmes des consolations célestes ». Il distribue tout ce qu’il peut de sa fortune pour soulager les misères de son cher troupeau ; et pour accroître ses aumônes, il se contente, « comme le peuple, de poisson salé et de pain bis ».

Il encouragea les prêtres par de multiples conseils pour les encourager dans leur mission : administration des sacrements et aussi soulagement de la population. Grâce son autorité et par l’exemple qu’il donne il put pour une grande part  pour obtenir le retour de ceux qui étaient partis se réfugier à la campagne  : il fallait remplacer  ceux qui étaient morts de la peste (en effet l’on estime que un cinquième du clergé marseillais serait mort durant cette période).

 


Vitrail représentant une réunion à l’Hôtel de Ville de Marseille

 

Même si parfois il s’opposa aux échevins de la ville il les soutiendra dans leur combat en participant aux diverses réunions : un tableau de Michel Serre, un artiste contemporain, le représente  assistant à l’une de leur réunion . D’ailleurs, le 8 septembre, jour de la Nativité de la Vierge les échevins invitent  Mgr de Belsunce à venir à l’hôtel de ville pour qu’il y célèbre la messe et recevoir le vœu qu’ils ont décidé de faire au nom de la ville. « Considér[an]t que la peste étant un fléau de la colère de Dieu, tous les secours des hommes et tous les efforts qu’ils ont résolu de faire seront vains et inutiles s’ils n’ont recours à sa miséricorde pour tâcher de la fléchir », ils s’engagent à donner chaque année à perpétuité 2000 livres à l’hôpital le plus récemment établi, en 1713, celui des orphelines, qui est sous le vocable de Notre-Dame de Bon-Secours. Et le 4 jun 1722, le Premier échevin Moustier prononça solennellement la promesse dans la cathédrale où s’étaient assemblés tous les notables et fit l’offrande d’un cierge pesant quatre livres, ainsi que l’avait suggéré l’Evêque

 

 

Comment Mgr de Belsunce échappa à l’épidémie de peste.

        Comme l’explique Régis Bertrand dans sa biographie Henri de Belsunce (1670-1755), l’évêque de la peste de Marseile (2020) ou encore Armand Praviel dans Belsunce et la peste de Marseille (1936) alors qu’un cinquième du clergé de Marseille périt de la peste, l’évêque traverse l’épidémie sans être frappé par la maladie. Pour lui, il doit cette protection à sa croix pectorale, qui contient des reliques de la Vraie Croix, envoyées par le pape, et qu’il porte sur lui dès qu’il sort : il appelle sa croix son “présevatif”. Une autre explication peut être avancée : Monseigneur de Belsunce se protège physiquement de la peste sans le savoir : en effet, entre sa perruque à la Louis XIV talquée tous les jours, sa soutane de taffetas, ses bas, ses chausses, ses souliers, il est couvert de la tête aux pieds ! Peu de risque d’être piqué par les puces, dont on ignore encore à cette époque qu’elles sont vectrices de peste. De plus, il prenait soin de changer de linge de corps tous les jours et il mettait devant sa bouche et son nez un mouchoir imprégné de vinaigre pour, ne pas être incommodé par la terrible puanteur des cadavers vu qu’il a parcouru les rues de Marseilles tous les jours. Au contraire, les prêtres qui ne prenaient pas de telles précautions et les religieux, dont les capuchins,  qui se déplaçaient en sandales et simple robe de bure, sans masque, sont très touchés par la maladies.

 


Statue de Mgr de Belsunce

 

Pour finir

    Ce n’est que le 22 août 1722 que les églises purent enfin ouvrir et le culte être célèbre normalement et le 22 octobre de la même année que la peste fut officiellement déclarée terminée  pour la Provence alors qu’il faudra attendre le 31 décembre pour le Languedoc.

Sans vouloir trop comparer deux époques différentes : les années 1720-1722 et l’année 2020 on peut s’apercevoir que malgré les décisions drastiques prises par le pouvoir royal, du moins en ce qui concerne le culte (puisque les églises étaient fermées et les célébrations impossibles) le clergé de cette époque a su allier une certaine continuité dans la vie spirituelle des habitants à une assistance charitable envers toute une population dont une grande partie parmi les plus pauvres ne faisait que survivre  le ravitaillement étant extrèmement difficile pour une ville mise à l’écart de toute communication avec les villes voisines.

         Si les survivants témoins de la Grande Peste de 1720-1722 revenaient parmi nous aujourd’hui peut-être seraient-ils étonnés ou scandalisés de voir nos réactions,  nos contestations et nos réclamations  devant les contraintes qui nous sont imposés aujourd’hui pour lutter contre la pandémie du Cocid-19 ? Le monde d’aujourd’hui habitué à son confort serait-il capable de vivre et de surmonter une pareille épreuvre ?


Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles

 

lundi 9 novembre 2020

De la peste en Provence de 1720-722 à la pandémie du Covid-19

DE L’EPIDEMIE DE  PESTE DE 1720-1722

A LA PANDEMIE DU COCID-19 DANS LE MONDE EN 2020

 

Vue du Cours pendant la Peste. Michel Serre. 1721

 

Photo d'un hôpital en Chine 

Une brève chronologie des évènements de 1720 à 1722



Maquette du Grand-Saint-Antoine

25 mai 1720 : arrivée du Grand-Saint-Antoine dans le port de Marseille

27 mai 1720 : décès d’un marin à bord du navire

29 mai : les marchandises sont débarquées aux Infirmeries de la ville tandis que le navire reste à l’Île de Jarre

20 juin 17200 : premiers dans la ville de Marseille

fin juin – début juillet 1720  : d’autres cas mais les médecins et les échevins se refusent à parler de peste

9 juillet 1720 : les médecins diagnostiquent pour la première fois la peste et on commence à prendre les mesures qui s’imposent

31 juillet 1720 : le Parlement d’Aix interdit aux marseillais de sortir de la ville et aux habitants des alentours de communiquer avec eux.

Fin  juillet 1720 – septembre  1720  :  la peste se répand dans les villes d’alentour : Aix, Cassis Apt, Digne, Toulon

Début août 1720 : Tout Marseille est contaminée et on compte plus de 100 morts par jour

25 août 1720 : fermeture de toutes les églises dans les villes touchées par l’épidémie (ce qui entraîne la suppression des messes, la célébration des baptêmes, des mariages, des enterrements et aussi toutes les processions)

Septembre 1720 : toutes les localités proches de Marseille sont touchées

14 septembre 1720 : un arrêt du Conseil du Roi ordonne la mise en quarantaine de toute le Provence.

Octobre 1720 : La Peste est à Arles, Saint-Rémy-de-Provence et a atteint Le Languedoc

1er novembre 1720 : Mgr de Belsunce consacre la ville de Marseille au Sacré-Cœur de Jésus lors d’une cérémonie sur le Cours

Hiver 1720 : Pause dan l’épidémie

Décembre 1720 : Tarascon

31 décembre 1720 : Mg de Belsunce organise une procession pour bénir les fosses communes situées hors des remparts de la ville.

Janvier 1721 : le foyer de Bandol s’étend jusqu’aux abords de Toulon et jusqu’au Gévaudan

Printemps 1721 : après une pause de 2 mois l’épidémie reprend et touche la Camargue entre Arles et Toulon

Eté 1721 : Avignon, Orange et tout le Comtat sont à leur tour touchés

Automne 1721 : dans Le Languedoc ce sont les villes de Mende, Uzès, Marjevols, Viviers

Printemps 1722 : une légère reprise à Marseille, Avignon et Orange

22 août 1722 : les églises sont autorisées à ouvrir et le culte peut reprendre normalement

2 octobre 1722 : la peste est déclarée terminée pour la Provence

25 décembre 1722 : La peste est terminée dans Le Langedoc

2020 : Tricentenaire de la Grande Peste de 1720 et pandémie du Covid-19

 


 

Colère de Dieu, mémoire des hommes - La peste en Provence 1720-2020 

Gilbert Buti

Paris, Le Cerf, 2020.  309 pages

 


 

À l'heure du coronavirus, quelles sont les leçons d'hier sur les pandémies qui peuvent valoir pour aujourd'hui ? En dressant l'histoire de la grande peste en Provence au XVIIIe siècle, ce sont nos peurs, nos confinements, nos détresses qu'éclaire, comme en un miroir, Gilbert Buti.

Rarement un livre d'histoire n'aura revêtu une telle actualité.
Car l'épidémie de peste, qui a touché une partie de la France en 1720-1722, a d'étonnantes résonances avec la pandémie de la Covid-19.qui se sévit dans le monde depuis le début de l’année 2020 avec comme conséquences : confinement, restrictions dans les déplacements, fermetures des lieux recevant du public et dont notamment les lieux de culte
Introduite à Marseille par un navire venant de Syrie, la peste a tué 120 000 des 400 000 habitants de la Provence, du Comtat et du Languedoc, soit près d'un sur trois. Pourquoi la contagion s'est-elle propagée, ravageant ou épargnant des localités parfois proches ? Malgré un ensemble de mesures de lutte, dont le confinement décrété par les pouvoirs locaux et soutenu par l'État royal, elle a menacé le reste de la France et effrayé l'Europe qui ont multiplié les barrières pour s'en prémunir. Face à l'impuissante médecine contre l'ennemi invisible, les hommes ont invoqué la colère de Dieu et la médecine du Ciel.
Privilégiant la parole des témoins malades, médecins, savants et religieux – et les apports des anthropologues, démographes et sociologues –, Gilbert Buti dresse un bilan de l'événement-catastrophe très tôt instrumentalisé. Et, trois siècles après, il en décrypte les traces laissées dans les mémoires et l'imaginaire collectif.
Assurément, cet ouvrage se veut une invitation à réfléchir au temps présent même si l’époque diffère par son mode de vie, son mode de pensée.

 

Biographie de l'auteur

Historien, professeur émérite à Aix-Marseille Université, Gilbert Buti est spécialiste de la Méditerranée aux Temps modernes, auteur de nombreux travaux sur les sociétés littorales et leurs représentations, les économies maritimes, la course et la piraterie.

 

 

 

Marseille ville morte : la peste de 1720

Charles Carrière, Marcel Courdurié,  Férréol Rebuffat

Marseille, Editions Laffitte,  2016. 352 pages.

 


Bien que n’étant pas l’ouvrage le plus récent sur les évènements vécus par la ville de Marseille dans les années 1720-1722 cet ouvrage peut rester comme une reference : il se fonde sur les témoignage de l’apoque, sur les écrits de ceux qui ont vécu cette tragédie. Il s’accompagne de plus d’une abondante bibliographie.

 

Le samedi 25 mai 1720, après dix mois et trois jours d'absence, arrive au large de Marseille le Grand-Saint-Antoine. A son bord, des hommes, du textile et, la peste. En acceptant de laisser amarrer ce vaisseau, Marseille ne soupçonnait alors pas qu'elle causait sa perte, et qu'elle allait ainsi se délester de près de 50 000 de ses habitants. cette étude menée tambour battant par des historiens spécialisés dans l'histoire de la cité phocéenne, décrit minutieusement une catastrophe humaine, ses causes et ses conséquences dans la mémoire collective, et fait la part belle aux nombreuses idées reçues que les siècles ont traîné avec eux.
Ainsi apprend-on que toutes les couches sociales, sans distinction aucune, ont été touches (bien que les plus pauvres de la population marseillaise aient payés le plus lourd tribu), ou encore que la maladie n'a pas véritablement provoqué de famine, mais plutôt un manque de ressources humaines considérables dû à la fuite devant l’épidémie de nombreux notables ayant rendu difficiles les relations de commerce.

Ce tragique et apocalyptique épisode de l’histoire de la cité marseillaise fut tellement incroyable dans ses différents degrés d'horreur, que l'on a l'impression que Marseille ville morte plonge le lecteur d’aujourd’hui  dans une fiction digne des plus grands scénarios de films catastrophe.
Cet ouvrage nous rappelle également que l'homme doit faire preuve d'humilité face aux lois de la nature ; cela, nous le saisissons au quotidien : le tsunami survenu en Indonésie en 2004 est toujours présent dans les esprits, et plus récemment encore le tremblement de terre en Chine en 2008 ayant
causé la mort de dizaines de milliers de personnes. Et aujourd’hui la pandémie du Covid-19 qui depuis le début de l’année 2020 a cause des millions de morts dans le monde entier.



Henri de Belsunce (1670-1755) - l Evêque de la Peste de Marseille 

Régis Bertrand

Marseille, Editions Gaussen, 2020. 480 pages.

 


 

Henri de Belsunce de Castelmoron (1671-1755)  a laissé un grand souvenir dans la ville de Marseille. Une des principales artères du centre-ville porte son nom depuis 1852. Sa statue, immense, s'élève dans l'enclos de la cathédrale. Mgr de Belsunce a dû affronter la dernière grande peste marseillaise, celle de 1720-1722. C'est elle qui l'a fait entrer dès son vivant dans l'histoire, à la fois pour sa conduite très courageuse et même héroïque pendant l'épidémie. Nommé évêque de la ville en 1709, il refusera de quitter son diocèse pour devenir archevêque et il sera enterré en 1755 dans sa cathédrale. Son long épiscopat correspond à près d'un demi-siècle de l'histoire de Marseille et des villes voisines. Il a joué un rôle dans la fondation de l'Académie de Marseille, a encouragé celle de la société sacerdotale du Sacré-Coeur et a été le mécène de plusieurs artistes.

 

L’auteur

Régis Bertrand, né à Marseille en 1946, historien. Agrégé d'histoire, docteur d'État es-lettres, il a été d'abord professeur au Havre puis à Marseille il a fait l'essentiel de sa carrière à l'Université de Provence  où il y a assuré  le cours d'histoire de la Provence et a participé à la création de l'Unité Mixte de Recherches Telemme, dont il a été le responsable de 1998 à 2004. Il a été aussi président (1991-1997) de la Fédération Historique de Provence.

 

 

 

Belsunce et la peste de Marseille

Armand Praviel

Paris, Editions Spes, 1938. 254 pages.

 




Armand Pradiel dans son ouvrage sur l’action de Mgr de Belsunce pendant  l’épidémie de peste de 1720 à 1722 relate les évènements depuis l’arrivée du navire Le Grand-Saint-Antoine  jusqu’à la fin de l’épidémie. Son livre se concentre principalement sur l’action de Mgr de Belsunce.  Quoique qu’il soit écrit dans un style hagiographique il a le mérite, en s’appuyant sur de nombreuses sources,  de nous faire vivre ce qui est connu dans l’histoire sous le nom de « Grande Peste de Marseille ».



Ainsi lorsque le Parlement d’Aix ordonna le 15 juillet 1720, Mgr de Belsunce commença à organiser des prières publiques pour conjurer le fléau. Puis dès le mois d’août les églises se fermèrent et il n’y eut plus aucun culte et les processions interdites par crainte de la contagion. C’est alors que l’évêque se donna sans compter avec l’aide de ses prêtres pour soulager la misère de la population et administrer les derniers sacrements aux malades.

"La terreur est grande, mais j'ai confiance en la miséricorde de Dieu" écrivait-il à son confrère l’évêque d’Arles  ou encore : «Quant à moi, je suis déterminé à rester avec les malades, à les réconforter, à mourir, si nécessaire, de peste et de famine…»

Face aux dégâts causés par la peste et au manque absolu de ressources humaines pour enrayer le fléau, il consacra la ville au Sacré-Cœur de Jésus lors d’une cérémonie expiatoire organisée sur le cour qui porte actuellement son nom le 1er novembre 1720. Il fit imprimer et diffuser de petites images du Sacré-Cœur appelées garde-fous : de petits morceaux de tissu rouge, sur lesquels le Cœur était imprimé avec cette inscription Il avait l'inscription : « Cœur de Jésus, abîme d'amour et de miséricorde, je place toute ma confiance en vous et j'espère pour toute votre bonté."

Cet appel à la confiance en la miséricorde divine était un message directement contraire aux doctrines jansénistes répandues dans la région. Sous son impulsion les magistrats, par résolution du 28 mai 1722, se sont empressés de faire la promesse suivante :

«Nous, magistrats de la ville de Marseille, convenons à l'unanimité de faire un vœu ferme, stable, irrévocable, entre les mains du Seigneur Évêque, pour lequel, dans cette qualité, nous nous engageons, nous et nos successeurs, pour toujours, à partir chaque année, le jour qui est prévu pour la fête du Sacré-Cœur de Jésus, écoutez la Sainte Messe dans l'église du premier monastère de la Visitation, dite des Grandes Maries, pour y communier et offrir, en réparation des crimes commis dans cette ville, une bougie ou une bougie de la cire blanche, pesant quatre livres, ornée de l'emblème de la ville, à brûler ce jour-là devant le Saint Sacrement; d'assister le soir même à une procession générale d'action de grâce que nous demandons et demandons que l'Evêque veut établir à perpétuité ».

Le 15 septembre 1722 Mgr de Belsunce put célébrer par un grand Te Deum la fin de la peste.

 

 Armand Praviel

 Armand Praviel, né à L’Isle-Jourdain (Gers) en 1875 et mort à Perpignan (Pyrénées-Orientales) en 1944. C’est un poète, journaliste, critique littéraire, romancier et comédien français

 Fils de Philippe Joseph Félix Praviel et de Noémie Vast-Tintelin, Armand Praviel est licencié en droit en 1895 et docteur en 1888 après avoir soutenu une thèse sur la criminalité de l’enfance.

À 24 ans, il adopte une cape noire doublée de velours rouge, qu’il ne quittera plus jamais. En 1895 il écrit ses premiers poèmes, qui sont publiés en octobre 1907. Alors qu’il joue une pièce de théâtre à Montauban, il rencontre Marguerite Duval, qu’il épouse à Reims
En 1897, il fonde à Toulouse la revue littéraire l'Âme Latine
 dont il sera directeur jusqu'en 1910, quand la revue fut reprise par la Revue des Pyrénées.

Pendant la Première Guerre mondiale, le lieutenant Armand Praviel est fait prisonnier par les Allemands. Il profite de cette inactivité et de son statut d’officier pour lire l’intégralité de l’œuvre de Balzac et pour écrire son premier roman, qui eut un succès considérable.

Sa femme, à la santé précaire, le quitte en 1929. Il meurt à Perpignan, chez son gendre, le 15 janvier 1944, et inhumé, comme son testament le stipulait, dans sa vieille cape noire. Ses cendres sont transférées dans le caveau familial du cimetière de l’Isle-Jourdain en octobre 1945.

 

 

 

 

Arles et la peste de 1720-1721 

Odile Caylux ; avec une préface de Régi Bertrand

Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2009. 280 pages.



 

Située au bord du Rhône et à la limite du'Languedoc, Arles est, au XVIIIe siècle, la quatrième ville de Provence. Gagnée par l'épidémie de peste (1720-1721) six mois après Marseille, elle est atteinte et perd un tiers de sa population. Les autorités consulaires mettent en oeuvre les mesures habituelles en temps d'épidémie : interdiction de circuler, limitation des déplacements (mais le vaste terroir agricole arlésien est indispensable à la vie de la cité), ouverture d'infirmeries, soins aux pestiférés, aide alimentaire aux nécessiteux, le tout sur fond de crise financière aiguë. Le très important fonds d'archives conservé permet de suivre pas à pas cet épisode tragique, d'en connaître les acteurs, d'analyser les décisions prises, d'en voir les conséquences. Fait exceptionnel, quatre consuls et trente-cinq conseillers municipaux, dévoués à la population, meurent pestiférés après avoir affronté un soulèvement populaire d'une particulière ampleur.

 


 

Tombeau aux Alypscamps des Consuls morts pendant la peste de 1720

 

 

Une importante bibliographie

 

Reproduction du Grand-Saint-Antoine qui apporta la peste à Marseille

Livre de J.B. Bertrand de 1779..Relation historique de la peste de Marseille en 1720. Amsterdam et Marseille, Jean Mossy, 1723.

Dr Jean-Baptiste Bertrand. Relation historique de la peste de Marseille en 1720, Cologne, Pierre Marteau, 1721, Cologne, Pierre Marteau, 1721, 512 p. 

Régis Bertrand, Le Christ des Marseillais : histoire et patrimoine des chrétiens de Marseille, Marseille, La Thune, 2008, 248 p. 

Dr Jean-Noël Biraben, « La peste en 1720 à Marseille, à propos d'un livre récent », Revue historique, Presses universitaires de France, n° 502,  France,  avril-juin 1978, p. 407-426.

Charles Carrière, Marcel Coudurié et Ferréol Rebuffat, Marseille ville morte : la peste de 1720, Marseille, Jean-Michel Garçon, 1998, 356 p. Garçon, 

Chicoyeau, Verny et Soulier, Observations et réflexions touchant la nature, les évènements et le traitement de la peste à Marseille, Lyon, 1721, 338 p.

Olivier Dutour, Michel Signoli, Émmanuelle Georgeon et Jean Da Silva, Préhistoire anthropologie méditerranéennes, t. 3 : Le charnier de la grande peste (rue Leca), Aix-en-Provence, Université de Provence, 1994, p. 191-203.

Augustin Fabre, Histoire des hôpitaux et des institutions de bienfaisance de Marseille, Imprimerie Jules Barile, Marseille, 1854, 2 volumes.

Jean Figarella (préf. Pierre Guiral), Jacques Daviel : Maître chirurgien de Marseille, oculiste du Roi (1693-1762), Marseille, Impr. Robert, 1979, 278 p.

Paul Gaffarel et de Duranty, La peste de 1720 à Marseille & en France, Paris, Librairie académique Perrin, 1911.

Françoise Hildesheimer, Le Bureau de la santé de Marseille sous l'Ancien Régime : Le renfermement de la contagion, Marseille, Fédération historique de Provence, 1980.

Louis François Jauffret, Pièces historiques sur la peste de Marseille et d'une partie de la Provence en 1720, 1721 et 1722, Marseille, Imprimerie Corentin Carnaud, 1820, deux vol. de 420 et 416 p.

Philippe Joutard (dir.), Paul Amargier, Marie-Claire Amouretti, James W. Joyce, « La peste de Marseille de 1720-21 vue par les Anglais », dans Provence historique, 1955, tome 5, fascicule 20, p. 146-154 

Georges Serratrice, Vingt-six siècles de médecine à Marseille, Marseille, Jeanne Laffitte, 1996, 798 p. 

Michel Signoli, Isabelle Seguy, Jean-Noël Biraben, Olivier Dutour, « Paléodémographie et démographie historique en contexte épidémique. La peste en Provence au XVIIIè siècle », Population, Vol. 57, no 6, 2002, p. 821-847.

Félix Tavernier, Aspects de Marseille sous la royauté, Marseille, Centre régional de documentation pédagogique, 1976, 117 p.

Charles Mourre, « La peste de 1720 à Marseille et les intendants du bureau de santé », p. 135-159, dans Provence historique, tome 13, fascicule 52, 1963 

Christelle Omnès, « La peste de Marseille de 1720 dans la littérature du xxe siècle », p. 99-111, dans Provence historique, tome 53, fascicule 211, 2003 

René Bore, Le Velay en lutte contre la propagation de la peste (1721-1722) : in Cahiers de la Haute-Loire 2018, Le Puy-en-Velay, Cahiers de la Haute-Loire, 2018

Fleur Beauvieux, «  Marseille en quarantaine : la peste de 1720 », L’Histoire, no 471, mai 2020, p. 10-19.

Gilbert Butti, Colère de Dieu, mémoire des hommes. La peste en Provence, 1720-2020, Cerf, 2020.



La Provence en 1720






La peste à Marseille à partir de l'Hôtel de Ville. Michel Serre






Tableau représentant le chevalier Nicolas Roze procédant à l'enlèvement des cadavres au quartier des Tourettes à Marseille. Michel Serre



Mgr de Belsunce pendant la peste de Marseille. François Gérard (1770-1837). 1834.



Le Mur de la Peste est un rempart édifié dans les Monts du Vaucluse pour protéger le Comtat Venaissin de la peste de Marseille. Il fut conçu par l'architecte de Carpentras Antoine d'Allemand.



Reproduction d'un billet de santé permettant aux habitants de se déplacer