Mourir pour Dieu dans le judaïsme, le christianisme, l’islam
Le Monde de la Bible n° 214, septembre-octobre-novembre 2015. 145 p
Entre les chrétiens d’Orient, « martyrisés » par des djihadistes à cause de leur foi, et ces mêmes djihadistes se
revendiquant « martyrs » au moment de mourir les armes à la main, « Le Monde de la
Bible » donne des clés pour
comprendre cette question du martyre à laquelle aucune tradition religieuse
n’échappe
Dans la Bible juiveL’actualité violente de ces dernières
années – mais surtout attentats du 13 novembre dernier à Paris souoigne
l’urgence qu’il y a à s’interroger sur la notion de martyre.
Selon Katell Berthelot (CNRS et
université d’Aix-Marseille), qui propose une typologie instructive- à propos de
la notion de « martyre dans les bibles hébraïques - il faut distinguer celui qui consent à la mort
imposée par un bourreau ; celui qui combat et se sacrifie pour Dieu et sauver
les autres ; celui qui se suicide pour échapper à la torture et
au renoncement de sa foi. Le premier se contentant de subir la violence, les
deux autres la choisissant.
Dans le christianisme : le témoignage des martyrsC’est le premier type de martyr que le
christianisme célèbre, depuis le IIe siècle, quand des témoins – « martus » en grec – étaient
persécutés par le pouvoir romain parce qu’ils refusaient de rendre un culte à l’empereur. « La
mort, explique l’exégète suisse Daniel
Marguerat, est la conséquence annoncée du témoignage. Toutefois, ce n’est
pas la mort qui est témoignage mais la parole confessante du témoin. » Dans l’islamIl est bon de s’attarder un peu plus
longuement sur ce que signifie le martyr dans le monde de l’islamLa notion de martyr que l’on trouve dans
la Bible a un sens éloigné de l’idéologie du martyre dans l’islam, ainsi que le
rappelle l’historienne arabisante Jacqueline Chabbi. Selon son interprétation, « la
rhétorique guerrière » et les
nombreuses incitations au combat que l’on trouve dans le Coran sont à
comprendre comme les appels vains de Mohammed à ses vieux compagnons pour les
pousser à s’engager, ceux-ci étant souvent peu enthousiastes à l’idée de
participer à des expéditions lointaines. « Si
les incitations sont nombreuses, c’est vraisemblablement que les volontaires ne
se bousculaient pas », estime
cette spécialiste du monde musulman médiéval.
Elle met en garde également contre une
interprétation superficielle qui associerait la notion de « qitâl » (combat) à celle
de « tuer ». Combattre
dans le Coran, selon Jacqueline Chabbi, n’a pas pour but de tuer, pour la bonne
raison que chaque tribu veut, au contraire, « avoir
le plus grand nombre de fils qui atteignent l’âge adulte, afin d’assurer l’avenir
et la défense du groupe ».
Ces versets coraniques qui associent le
combat et la mort viseraient donc surtout à mettre en garde contre le risque
d’être tué – donc de manquer aux siens – et de tuer autrui injustement – ce qui
déclencherait automatiquement la riposte du talion. « On
est donc aux antipodes des idéologies délirantes des mouvements dijhadistes actuels".
Publication : Claude TRICOIRE - Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
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