Le
paradis à la porte : essai sur une joie qui dérange
Fabrice
Hadjadj
Paris,
Le Seuil, 2011. 498 pages.
« Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que
votre joie soit parfaite. » (Jean
15, 11) : tel est le souhait de Jésus pour ses disciples et tel est
son souhait pour nous. Ilo est bon de se rappeler en ces jours de Pâque. C’est
ce que nous rappelle le livre de Fabrice Hadjadj : demeurer dans la joie
malgré un climat environnant qui pourrait nous porter à se laisser gagner à la
tristesse sinon au désespoir.
Vous
avez peut-être lu l'Enfer de Dante mais jamais son Paradis : il équivaut à vos
yeux à un néant immaculé. Or le paradis dantesque est bien plus différencié et
violent que son enfer. Béatrice y déclare au poète : " Si tu voyais mon
rire, tu serais réduit en cendres ". C'est pourquoi, au fond, l’on met
facilement le paradis à la porte : pour ne pas affronter l'exigence de sa joie.
Et la tentation est grande de se fabriquer à la place un petit paradis
artificiel, rassurant... qui fait un enfer très convenable.
Certes,
il ne s'agit pas de fuir vers un autre monde imaginaire, ni de régresser vers
ce paradis terrestre définitivement perdu depuis la chute d’Adam et Eve dont nous
parle la Genèse. A la notion d'un au-delà, on oppose à bon droit la requête de
vivre hic et nunc. Mais n’est-on jamais vraiment ici, maintenant. C'est là que
le vrai paradis révèle son paradoxe et se défend contre ses parodies : il n'est
pas évasion vers un ailleurs, mais une grâce déchirante d'être présent à tous
et à chacun, dans une ouverture symphonique, une créativité chorale.
Ce
livre invite à un itinéraire à travers la philosophie, la théologie et les arts
- de Nietzsche à Bonnefoy de Baudelaire au Bernin, de Sade à Mozart - afin
d'approcher ce que le paradis a de plus terrible et de plus beau : la béance de
sa béatitude. Oh ! il ne s'agit pas de se consoler à peu de frais, non, mais de nous convoquer à cette joie qui doit vous faire perdre toute contenance - comme un
clown - et détruire en vous tout contentement - comme un fleuve, lequel n'est
lui-même que de se recevoir et de s'offrir sans fin...
Publication : Claude Tricoire - Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
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