Rien que l'amour : repères
pour le martyre qui vient
Martin Steffens
Paris, Salvator, 2015. 90
pages.
Un livre de circonstance : à l’heure de la menace
islamiste, Martin Steffens explore le mystère de la foi et de l'amour.
Comment se
situer dans le monde actuel est devenu une question brûlante pour le chrétien :
doit-il le fuir, ou s'y engager et prendre position ? Evoquant le massacre des
chrétiens d'Orient par Daech et « l'humanisme sans aile », sans transcendance,
qui domine en Occident, l'auteur invite les chrétiens à ne pas fuir leur
vocation. Mais à l'assumer dans toute sa radicalité. A savoir, se préparer au
martyre, sans l'attendre, ni le rechercher. Simplement en se laissant posséder
par l'Amour qui pardonne et désarme, même ses pires ennemis. Un manifeste
brûlant de l'Amour qui s'est livré sur la Croix pour que l'homme vive.
Repères
Le mot « martyr » vient du grec martur qui
signifie « témoin » (de Dieu). Il désigne
les croyants morts pour avoir refusé d’abjurer leur foi.
Les premiers martyrs chrétiens datent de l’époque romaine, mais c’est au XXe siècle
que l’on recense le plus grand nombre de chrétiens persécutés. Et le phénomène
s’accélère.
Au
départ, ce fut un texte écrit pour consoler des amis endeuillés. Au final l’auteur
nous avons une réflexion sur la vocation chrétienne dans le contexte
actuel. Le titre peut étonner, mais Martin Steffens, a
souvent écrit sur le bonheur, sur le développement personnel d’où le titre
peut-être : Rien
que l’amour. Repères pour le martyre qui vient.
Ce
livre est pour celles et ceux qui, comme moi, ont peur. [...] Satan est sorti
de son terrier »,
écrit-il d’emblée.
« Les exécutions des chrétiens d’Orient, filmées par leurs bourreaux, sont les selfies du diable, qu’il poste sur la Toile pour qu’on ne l’oublie pas. » L’auteur de La Vie en bleu et du Petit Traité de la joie ne se veut pas un prophète du malheur. Il regarde le monde tel qu’il est et veut simplement réveiller des consciences endormis !
Malgré
tout, il invite à la joie et à l’espérance : « Ce livre est pour celles et
ceux qui ont peur, mais craignent aussi de se perdre dans cette peur », explique-t-il en préambule. « À quoi est-il appelé, celui
qui avoue la menace qui vient, mais devine derrière elle une menace plus grande :
la désespérance,
[...] l’habitude
de ne plus accueillir le jour qui se lève ?
[...] Comment inventerons-nous, demain, quand la guerre sera non plus à
notre porte, mais chez nous, durablement, comment inventerons-nous l’amour
qui, jusqu’à hier, soutenait
sans trop de peine l’effort de nos vies ? »
La maladie du déracinement
Martin
Steffens veut que l’on regarde en face ce que le Pape François appelle « Troisième Guerre mondiale
livrée par morceaux »,
« La menace qui vient » est
maintenant dans tous les esprits mais nous la vivons par écran interposé ;
la maladie de l’Occident c’est la culture du numérique dans laquelle nous
sommes habitués et dans laquelle sont éduqués les enfants : cette menace c’est
l’islamiste véhiculée par des hommes sans visages mais dont sont victimes les
chrétiens comme tous les opposants dans une certaine volonté théocratique.
Et cette, « la
menace qui vient » qui est brandie par des hommes sans visages, démultipliée par les écrans, se nomme
islamisme. Il dénonce le déracinement
poussé sur le bitume de nos banlieues sans âme : « la conjonction affreuse du Droit (juridisme européen et légalisme musulman)
et de la Technique (propagande, armements, consommation de gadgets à visée
exterminatrice). Le tout couronné d’une spiritualité sans incarnation. Une
spiritualité sans la terre qu’on travaille, sans le chant qu’on y chante, sans
le pain qu’on cultive ».
Il
dénonce également un « christianisme
corrompu »
par un esprit qui transforme le message de l'Evangile en religion de la liberté. Pour lui «Daech, c’est un produit pour tous les
Occidentaux désœuvrés du monde entier ; c’est
le grand divertissement. La fête sanguinaire et télévisuelle.
[...] Il
semble mimer, par son caractère à la fois informel et envahissant, la marche de
l’économie financière, le règne sans partage et sans ordre de l’économie sur ce
monde. »
Sainte Édith Stein, et les autres
Quoi
faire une fois que l’on a posé le diagnostic ? « Quand on sait qu’il faudra peut-être soi-même payer la vorace médiocrité de
l’Occident par le prix fort de cet ennemi (à la prostitution à laquelle nos
filles en Occident sont quotidiennement invitées, par la publicité, les
émissions grand public, Internet, correspond la prostitution forcée telle que
la subissent les chrétiennes sous Boko Haram ou sous Daech ; à la
conversion suggérée
de tout homme à la
platitude sans horizon d’un
humanisme sans aile, correspond la conversion forcée
de tous à l’islam,
etc.). Bref quand on sait le monde aujourd’hui, qu’on se sait dans le monde,
mais non pas du monde :
que faire ? »
L’auteur
réagit avec la foi, une foi qui sait voir ce qui se joue actuellement et qui se
tourne vers l’autre : la foi nous apprend à vivre et à aimer.
« Repères
pour le martyre qui vient… » Le
martyre n’est pas le martyre du kamikaze qui tue aveuglément ; le martyre
ce peut être de se défendre légitimement contre l'agresseur et pour le chrétien il ne peut s’agir
que d’une vie qui se donne par amour : « La grâce serait de trouver à se battre
sans entrer dans la logique du Mal. »
«Quel
don ? D’abord
le don de l’être,
le don de soi-même à
soi-même au milieu des autres », souligne Steffens en rappelant les exemples de saint Maximilien Kolbe,
de Etty Hillesum ou de sainte Edith Stein « sans qui la victoire des Alliés en 1945 n’aurait été que la victoire de la
Force sur la Force ». Si le martyre est don c’est parce que son
origine a sa source dans la force de l’Esprit. Le martyre ne désire pas
détruire l’autre : au contraire, il désire pour ses bourreaux le bonheur
de la vie éternelle.
Publication : Claude TRICOIRE. - Bibliothèque diocésaine d'Aix-en-Provence
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