Charles Ehlinger (1927-2020)
Charles Ehlinger, grande figure de l’édition
catholique, emporté par le Covid-19
Longtemps assomptionniste, directeur du Centurion, Charles Ehlinger fut
un acteur essentiel de l’édition religieuse pendant une trentaine d’années.
Traducteur, éditeur, auteur, il publia de grands livres d’entretiens.
Charles Ehlinger s’est éteint samedi 2 mai, à l’âge de 92 ans, des
suites du coronavirus qui
l’a atteint alors que son état de santé général s’était fortement affaibli
depuis l’hiver dernier. Assomptionniste pendant près de quarante ans, il fut un
remarquable éditeur dans le domaine religieux. On lui doit notamment de
nombreux ouvrages du jésuite François Varillon.
Né le 15 septembre 1927 à Urbès (Haut-Rhin), il fit sa première
profession chez les Augustins de l’Assomption en 1946 et prononça ses vœux
définitifs à Lyon le 21 novembre 1950. Ordonné prêtre à Lyon en 1954 après des
études de philosophies et une licence en théologie et en Écriture sainte, il
fut responsable de 1959 à 1964 de l’année de formation pastorale pour de jeunes
prêtres de plusieurs instituts religieux et diocèses.
Un homme attachant et influent
Doué d’un sens aigu du discernement, il laisse un souvenir ému à ceux
qui l’ont approché. La curiosité intellectuelle de ce travailleur acharné en
faisait une référence. « Charles laisse en héritage une
belle et noble vie, même si elle n’a pas été toujours facile. Le souci de
vérité qui l’a toujours animé l’a poussé à des décisions courageuses,
confie aujourd’hui le père Michel Kubler, assomptionniste, ancien rédacteur en
chef religieux de La Croix. Il a exercé – sans vraiment
s’en rendre compte – un rayonnement important sur de nombreuses personnes et
une sorte de magistère dans le monde de l’édition religieuse en son temps. »
Même émotion pour Marc Leboucher, éditeur chez Salvator qui fut
auparavant responsable des éditions DDB : « C’était un très
grand éditeur, un véritable accoucheur d’auteurs. Sa discrétion naturelle
allait bien avec la position de retrait en coulisses, inhérente à ce métier.
C’était un esprit acéré, toujours aimable, mais jamais complaisant dans le
travail. »
Un éditeur engagé
Directeur de 1964 à 1983 des éditions du Centurion qui font alors partie
du groupe Bayard (éditeur de La Croix), Charles Ehlinger constitua
un catalogue impressionnant de livres remarqués et d’auteurs importants. Il
traduisit le très controversé Catéchisme hollandais (1968),
lança la traduction pastorale de la Bible en 4 volumes, La Bible du
Peuple de Dieu (1971), ainsi que la publication des Actes du Concile
avec 200 pages de table analytique, constituant ainsi une première synthèse de
Vatican II.
Homme de rencontre et de dialogue, il créa une collection de livres
d’entretiens avec des personnalités religieuses ou profanes telles que le
cardinal dominicain Yves Congar, le cardinal François Marty, le cardinal
Etchegaray, mais aussi Alfred Grosser… et Georges Brassens ! Auteur lui-même de
grands entretiens, il était aussi un scrupuleux traducteur d’ouvrages de
théologie et d’exégèse en langue allemande ou anglaise.
Il a surtout publié des ouvrages à succès qui ont nourri la vie
spirituelle de milliers de lecteurs, avec des auteurs tels François Varillon (L’Humilité
de Dieu, puis La Souffrance de Dieu ; Joie de
croire, joie de vivre ; Beauté du monde, souffrance des hommes…),
l’assomptionniste André Sève (30 minutes pour Dieu, 1974, Essayer
d’aimer, 1976) ou encore Pierre Talec (Les Choses de la foi, 1973).
La traversée des épreuves
En 1984, au terme d’une réflexion douloureuse et ancienne sur sa foi, et
après deux années en congé de la congrégation, Charles Ehlinger renonçait «
pour motifs de conscience » à son ministère et à la vie religieuse sans pour
autant rompre les liens constants avec l’Église et avec l’Assomption. Il
rejoignait alors les éditions Desclée De Brouwer (DDB) comme éditeur et
directeur de collection, jusqu’à sa retraite au tout début des années 1990. En
2005 enfin, Charles Ehlinger, publiait avec Michel Kubler, un dernier livre
d’entretiens réalisé avec Mgr Joseph Doré sous le titre La Grâce de
vivre (Bayard).
Après quelques années de solitude en région parisienne, il s’était
rapproché de sa famille en Alsace et s’installait à Thann (Haut-Rhin). Il avait
dû quitter en décembre 2019 son appartement et le millier de livres qui lui
restait pour être hospitalisé à Oderen, avant de rejoindre l’Ehpad d’Oderen
d’où il a à nouveau été hospitalisé en soins intensifs durant ces trois
dernières semaines à Thann.
Publication : Bibliothèque diocésaine du diocèse d'Aix et Arles
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