René Luneau (1932-2020)
Coronavirus : décès du père René Luneau, un dominicain amoureux de
l’Afrique
Le père René Luneau, dominicain spécialiste de l’Afrique, est mort du
Covid-19 vendredi 17 avril, à 88 ans. Sociologue au CNRS, cet homme
chaleureux a beaucoup écrit sur l’Afrique, publié plusieurs ouvrages de
spiritualité et de théologie, ainsi que des essais assez critiques sur
certaines orientations du pontificat de Jean-Paul II.
La terre africaine et ses religions, Chants de femmes au Mali, Paroles
et silences du synode africain… Un coup d’œil à l’abondante
bibliographie du père René Luneau suffit à en apporter la confirmation : la
grande passion de sa vie fut l’Afrique, qu’il découvrit dès les débuts de son
ministère, en 1963. Pendant six ans, le jeune dominicain, alors trentenaire,
vécut à Dakar, avant de revenir en France qu’il ne quitta plus jusqu’à sa mort
vendredi 17 avril, du Covid-19. Il était âgé de
88 ans.
Bien qu’ayant relativement peu vécu en Afrique à l’échelle de sa longue
vie, le père Luneau fut, au sein de l’Église catholique et de l’Ordre des
dominicains, un fervent défenseur d’une plus grande autonomie pour l’Église
africaine. « Mon rôle est simplement de tendre le micro, pour amplifier
la voix de l’Afrique », disait-il à ses frères dominicains, qui le
décrivent aujourd’hui comme un homme chaleureux et un « grand affectif
».
Chercheur au CNRS et membre du groupe de sociologues des religions GSRL
(Groupe Sociétés, Religions, Laïcités), cet intellectuel enseigna à l’Institut
Catholique de Paris. Il fut également éditeur chez Karthala, où il dirigea la
collection « Chrétiens en Liberté/Questions disputées ».
« Chrétien de gauche »
Ce natif de Nantes aura été, de la fin des années 1970 jusqu’à son
départ pour la maison de retraite, vers 2015, alors atteint de la maladie
d’Alzheimer, un « pilier » du couvent Saint-Jacques, à Paris -
communauté dont il fut le sous-prieur de 2000 à 2006, puis de 2008 à 2010.
« C’était un bon prêcheur, il aimait cela », se
souvient le père Michel Mallèvre, aujourd’hui assistant du provincial des
dominicains, qui vécut avec lui au couvent Saint-Jacques près d’une vingtaine
d’années. « Il était toujours présent aux offices, et aimait faire
chanter. »
Ni marginal ni rétif à l’autorité, le père Luneau n’en fut pas moins
critique de certaines orientations ecclésiales, notamment sous le pontificat de
Jean-Paul II. Les titres de certains de ses ouvrages (parfois collectifs) parus
dans les années 1980 et 1990 parlent d’eux-mêmes : Le retour des
certitudes (1987), Tous les chemins ne mènent plus à Rome (1995)…
En 1990, il reçut même une demande d’explication de la Congrégation de
la doctrine de la foi, dirigée à l’époque par le cardinal Ratzinger, sur les
raisons de ces réticences. « C’était un chrétien de gauche, c’est
clair, mais il ne se serait jamais mis en marge de l’Église », assure le
père Mallèvre.
Un portrait saisissant du Christ
Outre ses travaux sur l’Afrique et sur le rôle de l’Église dans une
société sécularisée, le père Luneau a aussi publié des ouvrages de spiritualité
et de théologie, visant à rompre avec les images datées d’un Dieu pervers ou
lointain : Paraboles nouvelles, l’Évangile au jour le jour,
et surtout Jésus, l’homme qui évangélisa Dieu, reconnu comme un
livre de référence, où l’auteur dresse un portrait saisissant du Christ et de
son expérience intime de Dieu.
« Cet ouvrage fait partie des dix livres de référence qui n’ont cessé
d’encourager ma curiosité sur Jésus et mon intimité avec lui », confie
aujourd’hui Michel Cool, éditeur chez Salvator, qui voit dans ce livre «
un exposé à la fois très documenté et spirituellement inspiré par son
expérience de l’inculturation chrétienne en Afrique ».
Le père Luneau était par ailleurs un grand ami de La Croix,
en particulier à travers une longue complicité avec le père Bruno Chenu, avec
qui il partageait sa passion pour l’Église… et le football.
Atteint de la maladie d’Alzheimer, il fut résident de deux maisons de
retraite parisiennes, et ne communiquait plus guère depuis plusieurs mois.
Sources : La Croix du 18 avril 2020
LUNEAU, René ; ERNY, Pierre. – Des maraige ? … un mariage. –
Paris, Missions Etrangères de Paris, 1975.
LUNEAI, René. – Jésus, l’homme qui évangélisa Dieu. – Paris, Le Seuil,
1999. 250 pages.
LADRIERE, Paul (dir.) ; LUNEAU, René (dir.). –
Le retour des certutudes : évènements et orthodixie depuis Vatican II0 –
Paris, Le CQENTURION ? 1987. 312 pages.
CHENU, Bruno ; préf. de René Luneau. –
L’Eglise sera-t-elle catholique ? – Paris, Bayard Editions, 2004. 158
pages.
ELA, Jean-Mac ; LUNEAU, René ;
NGENDAKURIYO. – Voici le temps des héritiers. – Paris, Karthala Editions, 1981.
269 pages.
LUNEAU, René. – L’enfant prodigue. – Paris, Bayard,
2005. 170 pages.
LUNEAU, René. – Le rêve de Compostelle ; verds
la resauration d’une Europe chrétienne ?
- Paris, Le Centurion, 1989.
Jésus, l'homme qui évangélisa Dieu (Français) Poche –
1 avril 2009
René
Luneau
Paris,
Albin Michel, 2008. 304 pages.
Résumé :
Est-il un homme sur lequel on
ait autant écrit ? Peut-on encore découvrir du neuf dans les quatre Évangiles ?
Si, pour la foi chrétienne, le mystère de Jésus Christ ne se révèle que dans sa
mort et sa résurrection, les détails de sa vie "d'avant" sont-ils simplement
anecdotiques ? René Luneau pense l'inverse. Il a voulu retrouver les paroles et
les gestes de tous les jours, humains, simplement humains, de l'homme qui
"évangélisa" Dieu, qui Lui donna définitivement un autre visage. La
Résurrection n'a pas gommé les traits singuliers de celui qui aujourd'hui
encore déconcerte et fascine. Jésus évoque et montre Dieu comme jamais
auparavant et nous le restitue, libéré des ambitions et des peurs. Un
"Dieu inattendu" - pour notre étonnement, notre joie et notre libération.
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