mercredi 24 octobre 2007

Histoire de la séparation entre Juifs et chrétiens : recension

Recension de deux articles du Monde de la Bible (Hors-Série de automne 2007)
Intitulé «Premiers chrétiens : d’où viennent-ils ? »

Titre des articles :
a) Juifs et chrétiens, le moment de la séparation par François Blanchetière
b) Les chrétiens après l’incendie du Temple par Jean-Pierre Lémonon



Le premier article veut répondre à la question que beaucoup se posent : à quel moment les disciples de Jésus ont-ils cessé d’être considérés comme Juifs par les autre fils d’Abraham ? Comment ? Pourquoi ? L’auteur tente de faire la chronologie de cette rupture, et d’en comprendre le sens à travers la lecture des écrits intertestamentaires.

En effet, jusqu’au premier siècle de notre ère l’appartenance des disciples de Jésus au Peuple d’Israël ne pose aucun problème. Ensuite les rapports entre la secte des nazaréens (disciples de Jésus) et les autres Juifs vont se dégrader à mesure que les mouvements anti-romains se développent en Palestine. La destruction du Temple en 70 a.-p. J.-C. marque une étape dans la mesure où les prêtres et les sadducéens perdent de leur influence. Peu à peu le fossé se creuse notamment avec la « birkat-ha-minim » (prière de bénédiction contre les hérétiques), prônée par les autorités et qui exclut de fait les disciples de Jésus. La seconde révolte des Juifs contre Rome en 132-135 consomme la rupture entre les deux communautés : les nazaréens refusent de prendre part à cette révolte.
L’écrasement de ce second soulèvement marque la fin des espérances des Juifs. Les pharisiens se mobilisent alors pour sauver ce qui peut l’être de l’identité nationale. Désormais être juif c’est vivre exclusivement en conformité avec les enseignements des Pharisiens. Ainsi la fracture, puis la séparation sont la conséquence d’une grave crise d’identité au sein du judaïsme et non dues à des causes extérieures.


Si le professeur François Blanchetière s’est attaché à faire la chronologie de la rupture entre le judaïsme et le christianisme, Jean-Pierre Lémonon (professeur à l’Université catholique de Lyon) fait l’histoire d’un des courants chrétiens de cette époque, et qui en raison de son attachement aux pratiques juives, va disparaître peu à peu.
Pour comprendre les évènements des années qui suivent la destruction du Temple de Jérusalem en 70 par les armées de Titus, il faut reconstituer la pensée des nazaréens et des ébionites. Notre connaissance de ces courants est fragmentaire car elle nous est connue à travers les écrits des Pères de l’Eglise qui ont combattu ces courants. Les Ebionites sont une secte judéo-chrétienne, nom par lequel se désignaient certains disciples de Jésus en rapport avec les Béatitudes. Ils quittèrent la Palestine – entre 70 et 135 – pour s’installer dans la région de Transjordanie. On peut penser que ces groupes ont été également appelés nazaréens par les Pères de l’Eglise (nom signifiant « ceux qui observent des traditions secrètes ») et qui se trouvaient dans la même région (à Pella et Kochaba surtout). Mis au banc de la communauté juive ils professent un attachement à l’enseignement de l’Evangile de Jésus tout en vivant selon la loi juive ; ces sectes croient en Jésus en tant qu’homme seulement et rejettent les lettres de l’Apôtre Paul. Dénoncés par les Pères de l’Eglise comme hérétiques, ils devront choisir entre la synagogue et la communauté chrétienne surtout après la destruction du Temple. Privés du lien qui les rattachait à la ville et aux pratiques du judaïsme, ils disparurent peur à peu.




Pour en savoir plus : ouvrages disponibles à la Bibliothèque diocésaine

BLANCHETIERE, François. – Enquête sur les racines juives du mouvement chrétien (30-135). – Paris, le Cerf, 2001.
BLANCHETIERE, François. – Les premiers chrétiens étaient-ils missionnaires (30-135). – Paris, le cerf, 2002.
MIMOUNI, Simon-Claude. – Les chrétiens d’origine juive dans l’Antiquité. – Paris, Albin Michel, 2004.
MARGUERAT, Daniel. Dir. – Le déchrirelent : Juifs et chrétiens au premier siècle. – Genève, Labor et Fides, 1996.
MIMOUNI, Simon-Claude. – Le judéo-christianisme ancien : essais historiques. – Paris, le cerf, 1998
JAFFE, Dan : Le Judaïsme et l’avènement du Christianisme : orthodoxie et hétérodoxie dans la littérature

Juifs et chrétiens : la séparation

Article publié par la Bibliothèque diocésaine de Marseille Le Mistral



Au 1er siècle de Notre ère, les Chrétiens sont perçus par les Juifs comme membres du peuple d’Israël. Quand comment ces derniers en sont-ils venus à percevoir les disciples du Christ comme autres ? Cette question pose pour la période le problème de savoir qui est juif et qui ne l’est pas.

La perception des Chrétiens par les Juifs change petit à petit. Elle commence à évoluer après la révolte de 66-70.

Les Grands Prêtres perdent leur influence traditionnelle au profit des Pharisiens. Ces derniers sont hostiles aux Chrétiens.Cette évolution est entre autre attesté par la Birkhat ha Minim ou formule de malédiction que les Chrétiens ne pouvant prononcer contre eux-mêmes ce qui les excluaient de la communauté. La rupture devient définitive après la révolte de Bar Kozba en 132-135

Pourquoi les Chrétiens ont-ils été marginalisés ? Parce qu’en deux occasions ils ont fait preuve d’indépendance. Au niveau politique d’abord. Ils n’ont pas pris part ni à la révolte de 66-70 ni surtout à celle de 132-135. Au niveau religieux ensuite ils ont préféré à l’enseignement des Pharisiens l’enseignement de Jésus de Nazareth. Ce qui a eu pour conséquence aux yeux des Pharisiens de mettre en danger la nation juive qu’ils essayaient de rebâtir sur de nouvelles bases après le désastre de la guerre de 132-135.

En fait la rupture est due à une crise identitaire. Les Chrétiens qui affirment le primat de l’enseignement de Jésus refusent de ce comporter comme les autres Juifs qui eux mettent l’accent sur la prééminence de l’enseignement des Pharisiens. Ils deviennent alors autres.


Pour aller plus loin :

Blanchetière, François. - Enquête sur les racines juives du mouvement chrétien (30-135). - Paris, le Cerf, 2001.

Mimouni, Simon-Claude. - Les premiers chrétiens étaient-ils missionnaires (30-135). - Paris, le Cerf, 2002.

Marguerat, Daniel. sous la dir. - Le déchirement : Juifs et chrétiens au prmier siècle. - Genève, Labor et Fides, 1996.

Mimouni, Simon-Claude. - Le judéo-christianisme ancien : essais historiques. - Paris, le Cerf, 1998.

Jaffé, Dan. - Le judaïsme et l'avènement du christianisme : orthodoxie et hétérodoxie : 1er - 2è siècle. - Paris, le Cerf, 2005.