MAURICE BELLET
(1923-2018)
Maurice Bellet,
explorateur de la foi
Prêtre et théologien formé à la psychanalyse, Maurice
Bellet est mort jeudi 5 avril.
Il laisse une œuvre qui aura renouvelé la spiritualité
chrétienne.
Il était une figure proche, créative, mais aussi
critique et exigeante du christianisme contemporain. Auteur d’une trentaine de
livres, animateur de nombreux groupes, conférencier infatigable, Maurice
Bellet, 94 ans, est décédé jeudi 5 avril d’un AVC, à l’hôpital Sainte-Anne
à Paris. Prêtre, philosophe, théologien, poète à ses heures, il fut l’un des
premiers à établir un pont entre la psychanalyse et l’Évangile. De cette
rencontre, il puisa des mots nouveaux pour dire la foi chrétienne dans un monde
sorti du giron de l’Église.
Pour retrouver le suc de la vie chrétienne, au
lendemain de Vatican II comme de Mai 68, Maurice Bellet eut
l’intuition rapide qu’une profonde mue était à entreprendre, et tout un
discours de foi à revisiter. Il en livra un bel exercice dans Le Dieu
Pervers (DDB, 1979), dans lequel il entreprit de déconstruire une
théologie perverse où le « Dieu amour » était finalement devenu
l’ennemi de l’homme.
« J’ai toujours su qu’il y avait une
voie autre que celle d’une religion crispée »
Né en 1923 à Bois-Colombes (Hauts-de-Seine) de parents
qui s’étaient rencontrés dans le mouvement du Sillon fondé par Marc Sangnier,
Maurice Bellet se sentit toujours fils d’un christianisme incarné, généreux et
fraternel. « J’ai toujours su qu’il y avait une voie autre que celle
d’une religion crispée, sur la défensive, apeurée face à la critique et à la
nouveauté », confiait-il (1). Dans les années 1960, alors qu’il
prépare une thèse de philosophie sur « La fonction critique dans la
certitude religieuse », il choisit d’être à la fois prêtre et
psychanalyste. Ce double enracinement fit naître chez lui un style d’écriture
singulier, où transparaît une écoute attentive des maux humains autant que
spirituels. Ses livres s’enracinèrent dans ce creuset : la traversée de l’épreuve et de la maladie (L’Épreuve
ou le petit livre de l’infinie douceur (DDB, 1992), La
Traversée de l’en-bas (Bayard, 2005) ; la violence (Je ne suis pas venu apporter la paix… (Albin
Michel 2009), le désir (La force de vivre (Cerf, 1990), La
Chair délivrée (Bayard, 2015)…
Devant l’effacement du christianisme, sa réduction à
un héritage culturel ou son repli identitaire, Maurice Bellet n’évitait pas la
rudesse de l’enjeu. « Ce que nous avons à craindre, c’est la
disparition du christianisme. Précisons de la foi chrétienne. Car du
christianisme il subsistera toujours au moins des traces culturelles (…) Mais
les chrétiens auraient bien tort de croire que ce sauvetage culturel signifie
un retour de la foi », prévenait-il (2).
À ses yeux, l’issue n’était pas à chercher ailleurs
que dans la constance d’une « foi critique ». Il plaidait pour
la réforme de l’institution ecclésiale et l’élaboration d’une « saine
théologie ». Il invitait à « avoir foi en la foi », « car
la foi n’est pas seulement croire « des choses », y compris des
choses divines ; c’est faire
fond sur cette relation où foi, espérance et charité ne font qu’un ».
Source : Journal La Croix (5/04/2018)
1) La Vie, 2 novembre 2006. 2) La Croix du 14 décembre 2007.
Les œuvres de Maurice Bellet à la Bibliothèque
diocésaine d’Aix
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
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