mardi 2 juillet 2019

Jean-Louis Chrétien (1952-2019)


Jean-Louis Chrétien (1952-2019)




Jean-Louis Chrétien, homme de parole
Le philosophe Jean-Louis Chrétien est décédé vendredi 28 juin.
Dans un dialogue fécond avec les Écritures, mais aussi avec la littérature et la poésie, son œuvre cherchait à recueillir les résonances de l’expérience humaine.

Avec Jean-Louis Chrétien, mort à Paris vendredi 28 juin, c’est l’un des grands noms de la philosophie en France qui disparaît, alors qu’il venait de prendre sa retraite. Né le 24 juillet 1952 à Paris, converti au catholicisme dans sa jeunesse, il fit une carrière universitaire classique. Après l’École normale supérieure et l’agrégation de philosophie – à ces deux concours, il fut reçu premier –, il passa trois ans à la Fondation Thiers puis enseigna à l’université de Créteil. Enfin, il termina sa carrière comme professeur à la Sorbonne, chargé de l’enseignement de la philosophie de l’Antiquité tardive et du haut Moyen Âge.
Des générations d’étudiants gardent le souvenir de son enseignement, avec, accompagnant sa puissante vocation pédagogique et sa vaste érudition, une part non négligeable d’humour. En 2002, il recevait, de l’Académie française, le prix du cardinal Lustiger pour l’ensemble de son œuvre, riche d’environ 25 volumes.

La tradition du Dieu caché
C’est en 1985 qu’il publia son premier livre, Lueur du secret (L’Herne), dans lequel il étudiait la tradition du Dieu caché, et les rapports de la Révélation et du secret. Entre 1989 et 2001 parurent six livres de poèmes, puis Chrétien décida de clore cette partie de son œuvre, qui n’est cependant en rien une marge. D’une certaine manière, la rigueur de sa pensée s’y exprime pleinement. C’est ce que Merleau-Ponty nommait le cœur des choses et l’entrelacs de la chair et du monde, qui sont convoqués dans ces vers, comme l’analysa Jérôme Laurent, excluant les formes plaintives et narcissiques du lyrisme.

Le court essai intitulé L’Effroi du beau (Cerf, 1987) peut être lu comme une préface de l’œuvre à venir. Comme la poésie, l’art et la littérature resteront toujours des points d’approfondissement de la pensée phénoménologique de Jean-Louis Chrétien. En 1990, La Voix nuePhénoménologie de la promesse (Minuit), puis deux ans plus tard, chez le même éditeur, L’Appel et la Réponse posent l’axe de cette pensée au sein de laquelle la parole n’est pas un simple instrument.

Une méditation des Saintes Écritures
À ce propos, on se reportera à L’Arche de la parole et à Saint Augustin et les actes de parole (PUF, 1998 et 2002)« Toute voix humaine répond, toute inauguration est en souffrance et en passion sous une voix antérieure qu’elle n’entend qu’en lui répondant, qui la précède et qui l’excède. Elle ne parle qu’en écoutant, elle n’écoute qu’en répondant… », écrit Chrétien.
Réfutant une frontière étanche entre philosophie et théologie, il méditera les Saintes Écritures dans plusieurs ouvrages: « Nous ne parlons qu’appelés (…). Nous parlons pour avoir entendu, et ne cessant d’entendre, toute voix porte en elle plusieurs voix parce qu’il n’y a pas de première voix. » Le souci et l’exigence de la langue et jusqu’à la beauté du style de Jean-Louis Chrétien participent pleinement de son projet philosophique.
Souvent la réflexion du philosophe s’est concentrée sur un mot, une notionDe la fatigue (Minuit, 1996), La Joie spacieuse (id, 2007), ou il y a deux ans, comme un signe, Fragilité (id, 2017) (1). Il faut enfin citer les deux magnifiques volumes de Conscience et roman (id,2009 et 2011), dans lesquels l’analyse de la littérature ne contredit en rien les autres axes de ce qui est la pensée de Jean-Louis Chrétien.

Sources : Journal La Croix du 1er juillet 2019.


PRINCIPALES ŒUVRES A LA BIBLIOTHEQUE DIOCESAINE


CHRETIEN, Jean-Louis. – Le Regard de l’amour. – Paris, Desclée de Brouwer, 2000. 260,pages.

CHRETIEN, Jean-Louis. -L’intelligence du feu : réponses humaines à une parole de Jésus. – Paris, Bayard Editions, 2003. 202 pages.

CHREIEN, Jean-Louis. – La joie spacieuse : essai sur la dilation. – Paris, Les Editions de Minuit, 2007. 259 pages.

CHRETIEN, Jean-Louis. – Sous le regard de la Bible. – Paris, Bay-ard Editions, 2008. 133 pages.

CHRETIEN, Jean-Louis. – Pour reprendre et perdre haleine : dix brèves méditations. – Paris, Bayard Editions, 2009. 2010 pages.

CHRETIEN, Jean-Louis. – Répondre : figures de la réponse et de la responsabilité. – Paris, Presses universitaires de France, 2007. V-237 pages

CHRETIEN, Jean-Louis. – Saint Augustin et les actes de paroles. – Paris, Presses universitaires de France, 2002. 268 pages.

CHRETIEN, Jean-Louis. – Symbolique du corps : la tradition chrétienne du Cantique des Cantiques. – Paris, Presses universitaires de France, 2005. 310 pages.


Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles

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