mercredi 3 juin 2015

SAINTE JEANNE D'ARC

 
JEANNE D'ARC
COLETTE BEAUNE
PERRIN, 2004

" Morte à moins de vingt ans, Jeanne occupe une place à part dans l'histoire de France.

Jeanne d'Arc n'est pas très grande, ni très jolie, elle a des cheveux bruns, l'air solide, une tache rouge derrière l'oreille droite. D'un caractère trempé, elle se met parfois en colère et pleure quand elle veut. Jeanne se proclame chef de guerre pour bouter les Anglais hors de France. Elle rêve d'une nouvelle croisade afin de reconquérir Jérusalem et créer un monde nouveau. Ses voix, que le procès identifiera à celles de sainte Catherine, sainte Marguerite et saint Michel, la guident dans sa mission. Ainsi peut-on décrire la petite villageoise de Domrémy née vers 1412, étonnant mélange de culture chrétienne et de rites populaires. Son destin a croisé celui du royaume plongé dans l'interminable guerre de Cent Ans. Le roi Charles VII lui-même la reconnaît comme une prophétesse qui incarne en 1429 toutes les attentes des Français. Elle devient un mythe vivant. Et pourtant, Jeanne passera son temps à brouiller les limites sociales - paysanne, elle fait carrière à la cour -, sexuelles- vêtue en homme, elle fait la guerre-, ou religieuses -elle prêche et crée des objets sacrés. Ce charisme féminin est la source d'un pouvoir qui finira par gêner. L'incompréhension sera d'ailleurs l'un des ressorts de son procès qui la conduit pour sorcellerie au bûcher en 1431. Dans cette biographie passionnante et originale, Colette Beaune, déjà remarquée pour sa "Naissance de la nation France", a fait un travail magnifique d'érudition en retraçant les mentalités d'une époque qu'on croit révolue. Sa parfaite connaissance du monde médiéval offre un tableau saisissant de la vie de Jeanne, loin de l'icône politique et patriotique habituelle.

Reprenant sa vie depuis sa naissance jusqu'à sa réhabilitation en 1456, Colette Beaune s'interroge sur l'image de cette petite paysanne dans le monde médiéval. Son étude conduit à bien des mises au point. Une réévaluation politique d'abord. Même si son dévouement au roi est total, la Pucelle est autant à inscrire au sein d'un parti politique - les Armagnacs - que de la nation France. Une réévaluation religieuse ensuite. Jeanne est dans la lignée du prophétisme féminin. Avant elle, d'autres femmes ont prétendu pouvoir sauver la France. Aucune cependant n'a eu l'obstination de Jeanne.
Enfin, Jeanne brouille les limites sociales - paysanne, elle fait carrière à la Cour -, sexuelles - vêtue en homme, elle fait la guerre -, ou celles du profane et du sacré - elle prêche et crée des objets sacrés. Ce charisme féminin est la source d'un pouvoir informel qui finira par gêner, même ceux qu'il avait servi.
Cette biographie passionnante et novatrice a reçu le prix du Sénat du livre d'histoire." -able guerre de Cent Ans. Le roi Charles VII lui-même la reconnaît comme une prophétesse qui incarne en 1429 toutes les attentes des Français. Elle devient un mythe vivant. Et pourtant, Jeanne passera son temps à brouiller les limites sociales - paysanne, elle fait carrière à la cour -, sexuelles- vêtue en homme, elle fait la guerre-, ou religieuses -elle prêche et crée des objets sacrés. 

Colette Beaune est historienne, professeur d'histoire médiévale à l'université de Nanterre. Elle a publié Naissance de la nation France (Gallimard), Journal d'un bourgeois de Paris et Education et Culture, du début du XIIe siècle au milieu du XVe siècle (Sedes, 19999).

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