Penser la foi chrétienne après René Girard
Bernard Perret
Paris, Ad Solem, 2018. 327 pages.
Présentation de l’éditeur
L'œuvre de René Girard a remis l'anthropologie
religieuse au goût du jour et a influencé en profondeur d'autres
domaines des sciences humaines et sociales. Son apport à
l'intelligence de la foi chrétienne est considérable :
en montrant comment la Passion du Christ dévoile les ressorts
de la violence constitutive des sociétés, Girard a éclairé la
singularité des Evangiles par rapport aux mythes fondateurs
de la culture humaine.
Un nombre croissant de théologiens se
sont emparés de sa pensée pour reposer les questions du mal, du sacrifice et de
la Rédemption. L'un des bénéfices de cette lecture des Evangiles est de souligner
la cohérence entre la prédication du Royaume et la signification des
circonstances de la mort de Jésus. Plus largement, elle permet de lire les
textes bibliques comme la découverte progressive de la non-violence de Dieu.
Ce livre est d'abord une présentation des
enjeux de la pensée de René Girard pour le christianisme et un premier bilan
des théologies qui s'en inspirent. L'auteur conduit ensuite une réflexion plus
personnelle sur les rapports entre anthropologie et théologie. Il montre
comment la théorie de Girard permet de penser les relations entre religion et
violence, et il interroge le sens du rituel chrétien dans un contexte de
sécularisation.
Bernard Perret est
essayiste et vice-président de l’ARM. Il a mené une double carrière de haut-fonctionnaire
et de chercheur en sciences humaines. Ses travaux touchent des sujets
variés : questions économiques et sociales, écologie, anthropologie
sociale, christianisme. Il a publié de nombreux ouvrages, parmi
lesquels : L'Economie contre la société (avec Guy
Roustang ; 1993 ; réed. 2001) ; La Logique de
l'espérance (2006) ; Vers une raison écologique (2011).
Une
présentation enthousiaste du journal La Croix
Ce livre présente les enjeux pour le christianisme de
la pensée du philosophe qui a remis l’anthropologie religieuse au goût du jour.
Bernard Perret s’intéresse depuis longtemps à la
pensée de l’anthropologue et philosophe René Girard, décédé en 2015. Il en est
aujourd’hui sans aucun doute un des meilleurs connaisseurs en France.
Auteur de nombreux ouvrages sur des thèmes sociétaux,
collaborateur de La Croix (il a même été le chef du service
économique et social entre 1985 et 1987), et ayant occupé des responsabilités
importantes dans l’administration publique, l’actuel vice-président de l’Association
recherches mimétiques propose dans ce nouveau livre une réflexion pointue qui
tente de mesurer les effets sur la théologie et la pratique chrétiennes de la
pensée de celui qui a remis l’anthropologie religieuse au goût du jour.
Théorie mimétique
Bernard Perret commence par présenter de manière fort
claire et pédagogique ce « système de pensée à multiples facettes »
que constitue la fameuse « théorie mimétique » de l’académicien,
selon laquelle tout désir est une imitation (mimésis) du désir de l’autre.
Un désir d’être l’autre en possédant ce qu’il possède qui est à l’origine de
tous nos conflits, de toutes nos crises.
L’auteur poursuit sa réflexion en montrant, avec
talent, comment ce système girardien peut fournir une vision renouvelée de la
foi chrétienne, en permettant « de voir l’ensemble formé par la Bible
hébraïque et les Évangiles comme un unique “acte de communication” divin, dont
le fil conducteur est la découverte progressive d’un Dieu exempt de toute
complicité avec la violence ». Plus précisément, « l’apport le plus
évident de Girard à l’intelligence de la foi chrétienne est d’avoir éclairé
d’un point de vue anthropologique le sens de la passion du Christ »,
résume Bernard Perret.
« Pour René Girard, le thème principal du Nouveau
Testament est la subversion du schème victimaire », contribuant à exclure
la réponse « qui voit dans le supplice de Jésus un sacrifice de réparation
offert à son Père ».
Jésus, « victime pardonnante »
« La Passion marque ainsi l’accomplissement du
mouvement de démystification du sacré violent amorcé par l’Ancien Testament
(…), le mécanisme victimaire (y) est entièrement dévoilé et l’histoire du
sacrifice qui sauve racontée du point de vue de la victime innocente », à
savoir Jésus, véritable « victime pardonnante », qui montre de
manière exemplaire comment « pardonner et se laisser pardonner, c’est le
seul moyen d’en finir avec les comportements et les attitudes qui conduisent au
meurtre ».
Dès lors, on ne peut plus « considérer la
souffrance comme un bien en soi », contrairement à ce qui a souvent été
exprimé dans le christianisme, alors qu’il s’agit d’une « perversion, qui
commence quand on fait de la souffrance, fût-ce indirectement et subtilement,
une monnaie d’échange dans notre rapport à Dieu » !
Dans ce livre dense, parfois touffu, Bernard Perret
croise de nombreux thèmes importants pour la foi : le salut chrétien, le bien et le mal, l’impact du christianisme sur la
société… Dans son chapitre final, il pose une question de premier intérêt : « Faut-il “désacraliser” le christianisme ? »
N’étant pas lui-même théologien de métier, il s’appuie
sur deux théologiens dont la pensée, forte, doit beaucoup à l’œuvre girardienne : le jésuite suisse Raymund Schwager (1935-2004) et le
prêtre anglais James Alison (1959-) qui a fait paraître un ouvrage remarquable,
traduit en français en 2015 : 12 leçons sur le christianisme : pour une réception
renouvelée de la foi. Voici donc un ouvrage stimulant qui motivera tout
chrétien soucieux de réfléchir sur sa foi et ses implications pratiques dans le
monde déchristianisé d’aujourd’hui.
https://www.la-croix.com/Urbi-et-Orbi/Documentation-catholique/ESSAI-Lapport-Rene-Girard-theologie-2018-06-08-1200945492
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
Publication : Bibliothèque diocésaine d'Aix et Arles
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